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princesses de science

ginait les soirées laborieuses de ce ménage médical, l’existence double, les deux personnalités puissantes bien distinctes, avec cette cloison séparant leurs deux foyers de vie. « À distance », avait dit Thérèse. Et il songeait à son propre bonheur, à la douceur des veillées intimes passées naguère près de sa femme, qui brodait auprès de lui, sous la même lampe.

— Ainsi, ne put-il retenir, vous vous voyez fort peu…

— Avec quel plaisir aussi l’on se retrouve ! dit la jeune femme gaiement. Nous sommes des sages, voyez-vous, nous ne gaspillons pas le plaisir d’être ensemble ; nous le savourons à petites gouttes, comme une liqueur précieuse et mesurée.

Mais Fernand, plus fin, à qui n’avait pas échappé le sentiment de ce grand expert des choses du cœur, défendit sa femme :

— Thérèse est une nature si complète qu’elle peut donner toute son activité cérébrale à des études pénibles, et n’en garder que plus fraîche et plus vive l’activité de son cœur. Elle trouve encore, ce qu’elle ne vous dit pas, le temps de me faire une maison agréable.

Le veuf se tut. Il étudiait curieusement les jeunes époux ; mais Thérèse surtout lui semblait inquiétante. Il ne la comprenait pas encore. Il aurait voulu la retenir, l’observer davantage, cette compagne d’un homme qu’il aimait paternellement ; mais on aurait dit que la jeune femme, sentant cet examen, se dérobait.