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Page:Yver - Princesses de Science.djvu/144

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princesses de science

orageuses, uniques dans sa vie, elle avait le vertige ; bien vite elle en chassait alors le souvenir. Que serait-il advenu d’elle si Pautel, ce jour-là, lui avait demandé son amour !…

Mais aussi comme elle s’était ressaisie ! Quelle vigueur le travail infuse à ceux qui s’y consacrent ! Elle se glorifiait d’une telle domination sur elle-même. Cette science, qui l’avait sauvée, lui inspirait une étrange tendresse ; elle alla, dans son imagination exaltée de Slave, jusqu’à prêter une figure à cette tutélaire et maternelle médecine, son refuge. Un soir, elle saisit un livre de thérapeutique et se mit à le baiser avec une sorte de passion.

Cependant, autour d’elle, dans ce Quartier Latin tout frémissant de vie, de jeunesse et de plaisir, l’amour ruisselait par les rues, pareil à un grand fleuve dont elle remontait le cours, fièrement. Aux portes des brasseries, quand se nouaient les couples pour les promenades crépusculaires, Dina plaignait les femmes et méprisait ces jeunes Français qui s’en jouaient. Elle ne concevait que l’amour éternel, avec la fidélité intransigeante à un seul être.

Or, un soir, en revenant de la Faculté, au coin du boulevard et de la rue Cujas, elle vit deux amants s’embrasser. Le jeune homme, un grand étudiant blond en béret, lui tournait le dos, mais sa sentimentale et jolie maîtresse apparut à Dina, le temps d’un éclair, avec un visage voluptueux, comme en extase. Et Dina, s’enfermant dans sa petite cham-