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princesses de science

Le brave homme avait un petit tremblement dans la voix, ses puissantes épaules se soulevèrent. Il continua :

— Je me console en mettant au monde les petits des autres. Ça me fait comme une immense paternité.

Et, s’étant redressé, il étendait ses gros bras, ses mains célèbres, d’un geste si large qu’il semblait couvrir ainsi, majestueusement, une génération tout entière.

Celle qu’à l’École on appelait autrefois « Morphine » demeurait pensive, puis articula doucement, pour revenir à son propre cas :

— Quelle différence morale voyez-vous entre le mariage et la liaison ?

— La liaison est d’ordre privé, presque toujours secrète, comme infamante. Le mariage s’affirme publiquement, fièrement. C’est l’union reconnue de tous, ratifiée par la société.

— Cette ratification n’a aucune portée morale.

— La liaison est éphémère, le mariage durable.

— Et le divorce, qu’en faites-vous ?

— Le divorce, le divorce, mon Dieu, ce n’est qu’une exception.

— Mais, mon cher maître, tout le monde divorce aujourd’hui, plutôt deux fois qu’une ! Alors, quoi ! Quand une femme, dans une réunion, peut se rencontrer avec trois hommes et se dire qu’à tous les trois elle a appartenu, en légitime mariage d’ailleurs, et selon l’exigence de la société, je me