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princesses de science

du fauteuil de la brodeuse, une chaise dont Guéméné avait pris l’habitude. C’était le mois de juillet ; la chaleur était accablante : le médecin s’asseyait, exténué.

— Comme vous semblez las ! lui dit un jour la douce femme, en le considérant avec pitié.

— Je suis un peu fatigué, dit Fernand.

Elle disparut, revint au bout d’une minute, suivie de sa femme de chambre qui portait un plateau garni d’une collation : bouillon froid, vin sucré, petits fours. Avec timidité elle lui proposa de se rafraîchir. Mais il accepta presque vivement, avoua qu’il souffrait précisément de la faim, ayant, ce jour-là, fort mal déjeuné en l’absence de sa femme. Complaisamment elle le regardait manger ; puis, comme il achevait ce goûter, elle lui dit en baissant la voix d’un air secret :

— Madame Guéméné doit être fort occupée, n’est-ce pas ?

— Oui, fort occupée…

Il n’en dit pas davantage, et ce fut très poignant par la tristesse qui était en lui et que la subtile femme devina. Il détourna les yeux : elle l’observait en le plaignant. Elle se l’imaginait manquant de soins, d’attentions, de prévenances, de tendresse, près de la doctoresse imposante qu’elle n’aimait pas. Elle se souvenait aussi du dévouement qu’il avait montré près de Jourdeaux, près du petit André, et, par reconnaissance, elle aurait voulu le voir très heureux, inondé de joies, adoré.