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princesses de science

de dévouement, développés, nourris, excités si longtemps par la misère de son mari, inassouvis désormais et sans objet, se portèrent vers cette jouissance légère qu’elle offrait, comme un minimum de prévenance, à celui qu’elle aurait voulu combler. Souvent elle sortait le matin, flânait dans les grandes épiceries, cherchait des fruits de choix, éprouvait une satisfaction à les payer très cher. Parfois elle confectionnait elle-même des pâtisseries dont elle trouvait les recettes dans son journal de modes. La nuit, quand elle se réveillait, elle se demandait souvent : « Que servirai-je demain au docteur ? »

Lui cependant ne soupçonnait guère les attentions, les soucis délicats, les rêves mêmes, flottant autour de ce guéridon léger qui lui apparaissait chaque jour, tout dressé, tel que si la charmante femme n’avait eu pour le créer qu’à donner un coup de la baguette des fées. Peu accoutumé chez lui à de telles gâteries, il mangeait en gourmand, sans trop songer même, le plus souvent, à complimenter madame Jourdeaux qui attendait un mot flatteur et devait se contenter du plaisir qu’elle lui voyait. Mais, au bout d’une dizaine de jours, le petit André fut rétabli, se leva, sortit, reprit sa bonne mine.

— Je n’ai plus besoin de revenir, dit Guéméné, voilà l’enfant tiré d’affaire.

— Alors, demanda-t-elle un peu troublée, où goûterez-vous désormais ?