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princesses de science

la table. Soudain, dans l’escalier, une chanson se fit entendre, se rapprocha : c’était une voix d’homme un peu timide et hésitante, qui chantait. Puis la porte s’ouvrit ; la voix pénétra dans l’appartement : Thérèse perçut le dernier vers lyrique de l’Internationale.

« Ah ! pensa-t-elle, voilà monsieur Adeline qui rentre, et si gaiement !… Quand il apprendra le drame, quelle terrible secousse !… »

Elle aimait bien ce « bon monsieur Adeline », si tranquille, si résigné, si excellent mari. C’était, à vrai dire, un homme simple, mais sa vie honnête séduisait Thérèse, et le bel exemple qu’il donnait d’un époux entièrement docile aux exigences du métier de sa femme le lui rendait sympathique. Elle se leva vite pour prévenir la terrible émotion qui attendait le pauvre homme dans sa chambre. Mais, avant elle, la doctoresse était arrivée, et toutes deux, dans le salon d’attente à demi obscur, où l’on sentait l’humidité des arrière-cours parisiennes, se trouvèrent en face d’un homme titubant, le chapeau en arrière, qui s’affaissa sur une chaise sans pouvoir aller plus loin.

— Il fait chaud, dit-il d’une voix traînante, sans voir Thérèse. Que Lucie aille m’acheter une canette bien fraîche.

Madame Adeline saisit la main de Thérèse, et l’entraîna aussitôt jusque dans le cabinet de consultation.

Alors, là, dans cette pièce misérable où elle