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Page:Yver - Princesses de Science.djvu/387

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princesses de science

d’une affection capricieuse, ardente, exclusive. Elle lui confiait ses tristesses intimes, la passion brutale d’un mari qui ne croyait pas à son mal ; elle lui confessait tout, sentant chez la femme-médecin moins une amitié qu’un ministère sacré fait pour autoriser tous les aveux. Quand elle apprit la défection de Thérèse, une scène déchirante se passa au chevet de ce lit. La malade se tordait les mains, pleurait, s’agitait en dépit de toute prudence, s’écriait :

— Mais vous ne pouvez pas m’abandonner, j’ai besoin de vous ! Je ne veux pas d’un homme pour me soigner. Vous étiez la seule à qui je pusse tout dire.

Thérèse promit de revenir quelquefois, en amie. Mais elle sortit bouleversée de cette maison. Insidieusement, et comme par une ruse suprême pour la retenir, son métier revêtait maintenant le caractère d’une mission. Elle eut des remords de s’y dérober. N’était-elle pas infidèle à un grand devoir ? La femme-médecin, près de la femme malade, peut tenir un rôle spécial et précieux. Elle se rappela toutes les confidences d’épouses qu’elle avait reçues, tous les conseils qu’elle avait donnés. Avait-elle le droit de déserter ?…

Puis quand, le soir, elle retrouva Fernand plus sombre, plus froid, plus détaché d’elle que jamais, son désespoir fut si vif qu’elle ne tergiversa plus sur la mission, les devoirs, le rôle spécial d’une femme qui se sent perdre son mari.