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princesses de science

un air de gravité triste. Il s’était soustrait aux difficultés de la clientèle en se consacrant, dans la presse, aux puissantes réclames pharmaceutiques, sous couleur de vulgarisation scientifique.

— Eh bien ! s’écria l’amusante Jeanne Adeline, qui retrouvait partout des amis, et que son heureux sans-gêne mettait partout à l’aise, ça marche, docteur, les Granules hépatiques ?

Et elle éclatait de rire, malicieusement, toute secouée par les cahots de la voiture qui s’était mise en marche, lentement.

Ces Granules hépatiques, dont elle parlait, avaient fait récemment le sujet de trois chroniques successives, signées Gilbertus. Il y passait en revue les divers traitements des maladies du foie, et terminait par un discret conseil favorable aux granules du professeur Philindor.

Gilbertus parut très contrarié de cette allusion. Il avait fini par se prendre au sérieux, encouragé d’ailleurs par ses succès. Le public le lisait en effet comme un oracle, enchanté d’apprendre à si bon compte la pathologie de ses reins, de son foie, de ses poumons ou de son cœur, selon que Gilbertus préconisait une spécialité diurétique, purgative, pectorale ou stimulante. Grâce à ses articles, les gens du monde parlaient aujourd’hui couramment de cirrhose, d’emphysème, d’adhérences, de dégénérescences, d’érythème… Lui-même soignait sa prose jalousement, la rendait, en même temps, élégante et accessible à tous.