Quelques Odes de Hafiz/13

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Traduction par A.L.M. Nicolas.
Ernest Leroux (Bibliothèque orientale elzévirienne, LXXIIIp. 63-66).
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XIII


L’aurore commence à poindre, les nues se rassemblent comme des troupeaux de moutons. Oh ! amis, du vin ! du vin ![1].

Les gouttes de rosée perlent sur les tulipes, ô amis ! du vin du matin ! du vin !


Le zéphyr du séjour céleste souffle et traverse la prairie. Oh ! buvez ! buvez ! buvez constamment du vin limpide.


Les fleurs entrelacées forment un trône d’or sur le gazon ; oh ! profite d’un tel moment, jouis de ce vin couleur de feu.


Désormais la porte de la taverne est fermée, ouvre-la, toi qui ouvres toutes les portes[2].


Il est étrange qu’en une saison pareille l’on mette tant d’empressement à fermer les portes de la taverne.


Si, comme Alexandre, tu prétends à la vie éternelle, cherche-la sur les lèvres roses de cette ravissante beauté.


Oui, tes lèvres, tes jolies lèvres étaient en droit de déverser sur les blessures brûlantes de mon cœur tout le sel dont elles sont empreintes.


O Hafiz, n’aie aucun chagrin, car la fortune, cette amante chérie, finira bien par soulever son voile en ta faveur.


  1. Particulièrement le vin du matin, il est recommandé, en effet, en Perse, de boire une ou deux coupes de vin le matin ; au réveil après une nuit d’orgie. Ils se débarrassent ainsi, disent-ils, du mal de tête qui suit les excès ; le vent du matin jouit aussi, paraît-il, de propriétés thérapeutiques du même genre.
  2. Allusion à un passage du Koran où Dieu est qualifié d’ouvreur de toutes les portes.