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Autour de l’Afghanistan/Chapitre IV

La bibliothèque libre.
Librairie Hachette et cie. (p. 77-102).

CHAPITRE IV

DE LA FRONTIÈRE CHINOISE À YARKAND

Le col du Beïk. || Un passeport improvisé. || Difficultés avec les caravaniers. || Ili-Sou. || Premier contact avec les autorités chinoises. || Tasch-Kourgan. || En route pour Yarkand. || La passe de Kok-Mouinak. || Tor-Bachi et le Tang-i-Tar. || Un karaoul cambriolé. || Arpalik. || La gorge infernale. || Yarkand.
* * *


Le col du Béïk est le plus méridional de tous les passages permettant de franchir la chaîne du Tagdoumbasch, massif élevé qui sépare les Pamirs de la vallée du Sarikol. C’est au col même que viennent se réunir les trois lignes frontières de la Russie, de la Chine et de l’Afghanistan.

Nous allons entrer dans une contrée à peine explorée, où nul chemin tracé ne doit guider notre caravane. Mais mon intention étant, comme je l’ai dit, de gagner par la route la plus courte la haute vallée du Raskem, je n’ai pas hésité à prendre une voie peut-être plus difficile, mais du moins plus intéressante par sa nouveauté même.

23 juillet. — La neige tombée pendant la nuit recouvre le sol, un épais brouillard obscurcit l’atmosphère ; tout cela ne nous promet pas une étape bien agréable. Fort heureusement, les nuages disparaissent peu à peu et nous pouvons partir avec l’espoir de passer le col dans de meilleures conditions. Le chef des yourtes d’Ak-Beït nous accompagne quelques instants, puis descend de cheval et prend congé à la mode kirghize : c’est le dernier sujet du Tzar que nous verrons sur la route jusqu’à notre rentrée en Perse par le Seïstan. Aujourd’hui, sans doute, nous ferons connaissance avec les fonctionnaires de l’Empereur de Chine.

La montée ne présente aucune difficulté. De nombreux chameaux, chaudement vêtus, pâturent en liberté autour de nous ; plus loin, la vallée se resserre et nous parvenons au col du Beïk entre deux parois de schiste couvertes de neige. Quelques troupeaux d’ibex se montrent sur les pentes, mais trop haut, hélas, pour que l’on puisse utilement leur envoyer un coup de fusil. Le passage est largement ouvert ; un petit lac en partie gelé en occupe le sommet ; nous sommes à 4 700 mètres d’altitude.

Si l’ascension est des plus aisées du côté russe, la descente en territoire chinois est au contraire périlleuse ; aucun sentier n’existe, il faut dégringoler dans des éboulis à 45° où les chevaux risquent à tout instant de se rompre le cou. Par bonheur, la caravane arrive entière au bas de cette côte rapide et nous retrouvons la rivière du Beïk que nous suivons à travers des blocs de rocher sur lesquels nos chevaux glissent à chaque
LES SARIKOLIS D’ILI-SOU.

MAZAR DE SEÏD-HASSAN.
pas. Toujours nulle trace de chemin ; aucun être vivant ne vient animer cette vallée aux flancs couleur de soufre. Il semble qu’on ne touchera jamais au but de l’étape — le confluent du Beïk et du Sarikol. Rahim-Berdi affirme que nous devons trouver des yourtes. Cependant vers cinq heures, alors que nous désespérions, les tentes coniques se montrent enfin à un coude de la rivière ; elles dressent leurs coupoles de feutre sur une étroite pente gazonnée que domine une gigantesque muraille de granit.

Bientôt nous sommes sur la rive gauche du Sarikol dont les eaux mugissantes ne nous inspirent qu’une médiocre confiance. Les habitants de la yourte nous ont aperçus ; ils nous indiquent le gué avec force gestes. Malgré tout, la rivière est dure à passer : nos chevaux perdent pied et nagent même par instants, et Zabieha, dont la monture bronche, a ses bottes remplies d’eau.

Nous voilà à Beïkni-Aouzi[1] sains et saufs, et dans la yourte un feu clair de sarments, chose nouvelle et inappréciable, a vite fait de nous sécher. Les caravaniers arrivent une heure après nous, éreintés des efforts qu’ils ont eu à faire ; pour les réconforter, je leur achète un mouton tandis qu’Enselme extrait de la caisse aux médicaments un thapsia et le place sur la poitrine du grand Rouzi qui tousse à faire craquer sa peau rude.

Mais le karaoul vient nous rappeler que nous sommes en Chine : il me demande mon passeport, que je ne lui donne pas et pour cause ; il doit se contenter d’une feuille de papier sur laquelle j’ai inscrit nos noms, prénoms et qualités. D’ailleurs je voudrais bien savoir ce qu’en pourra faire le mandarin de Tasch-Kourgan auquel un djighite portera ce soir même le passeport improvisé…

24 juillet. — Dans la claire lumière du matin, nous faisons route vers le Nord en suivant la rive droite du Sarikol. Çà et là, des prunelliers, des églantiers, quelques saules rabougris jettent leur note verte sur la teinte grise des galets, et ces arbustes excitent notre admiration, car depuis le Taldik nous n’avons rien vu de semblable. Mais bientôt les parois de la gorge s’écartent ; nous arrivons au pied d’un promontoire rocheux qui domine le confluent du Sarikol et du Khoudjer-Ab et que nous devons contourner pour remonter le cours de ce dernier torrent. À gauche, s’ouvre la vallée de Tasch-Kourgan couverte de brouillards ; en face, la haute chaîne qui nous sépare du Raskem-Daria et vers le sud, marquant la frontière des Indes, le massif énorme du Mouz-Tagh.

La caravane fait halte, vers midi, tout près du mazar de Seïd-Hassan. Là, sur le bord de la rivière, s’élèvent de misérables yourtes. Après de longs pourparlers nous obtenons des Kirghizes qu’ils nous en cèdent une pour la nuit, mais cette location est consentie de fort mauvaise grâce et les femmes surtout nous font un accueil des plus maussades.
HALTE À TOURLAN-CHAH, AVANT LE PASSAGE DU GUÉ DE TASCH-BOURGAN.

Pendant le déménagement j’admire les bijoux de la jeune fille de la maison, Mlle Tavar. L’extrémité de ses longs cheveux, tressés en innombrables nattes, est liée à une sorte de peigne qui les tient étalés sur toute la largeur du dos. Au peigne sont attachées des pièces de monnaie d’où pendent, au bout d’un fil noir, une douzaine de dés à coudre qui se heurtent, quand elle marche, avec un joli bruit de clochettes. Elle est ravie de recevoir une paire de boucles d’oreilles en métal blanc. Sa mère, une vieille sorcière noire, édentée, affreuse, réclame aussi quelque cadeau, et je la gratifie d’une bague ornée d’une simili-turquoise dont elle se pare incontinent…

J’espérais avoir ainsi conquis la bienveillance de notre hôtesse, mais je me trompais étrangement. En effet, sur la fin du jour, le caravanbasch pénètre dans la yourte et me déclare qu’il ne veut pas aller plus loin, car la haute vallée du Raskem est impossible à suivre en cette saison, à cause de la hauteur des eaux. Une heure de discussion ne parvient pas à vaincre son entêtement, mais comme j’espère trouver des yaks et des porteurs au pied de l’Ili-Sou, je lui intime l’ordre d’avoir à me suivre demain, lui et ses chevaux. Cette brusque décision avait suivi de près une conférence de nos hommes avec la vieille mégère qui, je l’ai su plus tard, ayant pris le thé dans la tente des caravaniers, leur avait affirmé que pénétrer dans le Raskem, c’était courir à une mort certaine. Nous sommes furieux de cette fâcheuse intervention et j’ai toutes les peines du monde à arracher la vieille femme des mains de Zabieha qui veut absolument la jeter dans la rivière.

Le lendemain dès l’aube, les discussions recommencent avec nos hommes, plus véhémentes encore que la veille : je finis cependant par les décider et nous partons pour l’Ili-Sou. Après on verra !

Le sentier remonte le Khoudjer-Ab, passe devant le vieux mazar de Seid-Hassan recouvert suivant la coutume de queues de yaks et de cornes d’ibex et, courant au sud-est, nous amène après une marche de 20 kilomètres dans un petit vallon herbeux que dominent quelques yourtes. Le baromètre indique 4 160 mètres, nous sommes au pied du col d’Ili-Sou.

Dès notre apparition sur le plateau, les indigènes se précipitent pour nous saluer et aider au déchargement des bagages. Ce sont des Sarikolis, musulmans chiites, dont la tribu est originaire du Wakan ; tous ont le type israélite très accusé et sont d’une saleté repoussante. Ma première parole est pour leur demander s’ils ont des yaks qui pourraient transporter mes caisses au delà du col, mais d’un commun accord, ils répondent qu’ils ne possèdent que des yaks femelles et que je ne trouverai dans la montagne aucun homme qui veuille m’accompagner. D’ailleurs, ajoutent-ils, entreprendre la route du Haut Raskem en cette saison serait folie.

Je vais donc être obligé, bien contre mon gré, de céder aux caravaniers et de me rendre à Tasch-Kourgan d’où j’essaierai de gagner Kilyang par la route
LA CITADELLE CHINOISE DE TASCH-KOURGAN.
transversale suivie déjà par M. Dauvergne. Cette résolution une fois prise, je m’éloigne en compagnie d’Enselme et de Zabieha et nous allons faire un tour dans les environs du campement afin de chasser les idées sombres.

À notre retour au camp, nous remarquons une agitation qui présage du nouveau et ne nous dit rien de bon. Nos hommes sont-ils partis emmenant les chevaux de la caravane ? Y a-t-il eu rixe avec les indigènes ? Rien de grave heureusement… c’est un des officiers de l’Amban[2] de Tasch-Kourgan accompagné de deux superbes cavaliers, qui vient nous saluer de la part de son chef. Lui aussi nous déconseille absolument le Raskem, mais il propose que l’un de nous aille examiner la route de l’autre côté du col, et si nous la jugeons praticable, l’Amban nous permettra de passer moyennant une déclaration écrite qui mettra sa responsabilité à couvert. Réflexion faite, et pour éviter une perte de temps sans nul doute inutile, nous lui disons notre intention de partir demain pour Tasch-Kourgan.

26 juillet. — Étape monotone et triste : nous repassons devant le mazar de Seïd-Hassan, devant les yourtes où la sorcière ne manque pas de nous narguer et nous continuons vers le nord en suivant la rive droite du Sarikol jusqu’aux pâturages de Tchilarik[3]. Le représentant de l’Amban, Khartchan-Beg, fait aussitôt préparer une yourte et, les Sarikolis ne se hâtant pas suffisamment à son gré, il tombe sur eux à coups de nagaika[4].

La justice immanente a frappé le caravanbasch ; un de ses chevaux est mort aujourd’hui pendant la route…

L’étape du lendemain à travers les galets du Sarikol est fastidieuse : en face de nous, se dressent à l’horizon les glaciers resplendissants du Mouz-Tagh-Ata, ou « Père des montagnes », tandis que vers l’ouest la muraille dentelée du Pamir semble vouloir escalader le ciel. Vers midi, on arrive au village de Tourlan-Chah situé, au milieu de riches cultures, en face de Tasch-Kourgan qui n’est séparé de nous que par le torrent. Çà et là des bouquets de saules entourés d’un mur : nous n’avions pas vu d’arbres depuis Goultcha ! On s’installe à l’ombre pour déjeuner, car la rivière est difficile à passer et le Beg pense qu’il vaut mieux attendre la caravane. L’endroit est charmant, nous nous y attarderions volontiers, mais nos hommes arrivent avec les bagages et nous nous remettons en route à leur suite. Du reste le passage du gué n’est pas commode ; quoique la rivière soit partagée en sept ou huit bras, nous avons beaucoup de mal à la traverser à cause de la rapidité du courant et de la hauteur des eaux.

De l’autre côté du Sarikol nous cheminons dans une plaine gazonnée, toute parsemée de fleurs, qui s’étend jusqu’au pied de la colline où s’élève la petite
L’ASCENSION DU COL DE KOK-MOUÏNAK, À TRAVERS UN CHAOS EFFROYABLE DE PIERRES ÉBOULÉES.

UN TROUPEAU DE YAKS APPARAÎT TOUT À COUP ET NOUS BARRE LA ROUTE.
ville de Tasch-Kourgan[5] et le Beg nous conduit dans une maisonnette chinoise qui fut construite, paraît-il, pour loger les voyageurs de marque.

À peine installé, j’envoie Iskandar porter nos cartes de visite[6] à l’Amban et le saluer de notre part ; le mandarin fait répondre qu’aujourd’hui il est un peu souffrant, mais que demain il se fera un plaisir de recevoir Nos Excellences. Dans la journée nous allons serrer la main du lieutenant russe commandant le poste des cosaques : très aimable, il met à notre disposition le petit pavillon où sont installés les bains du détachement et je crois inutile de dire avec quelle volupté nous profitons de sa gracieuse attention.

29 juillet. — La matinée se passe à visiter les abords du village. Tasch-Kourgan, en chinois Pou-ly, compte sept ou huit cents habitants et son importance provient surtout de sa position stratégique à la rencontre des nombreux chemins venant du Pamir et des Indes. Les Chinois y ont une sorte de légat qui administre et surveille la région, les Russes une douzaine de cosaques et les Anglais un vice-consul indigène, officier de l’armée des Indes. Tout ce monde vit, paraît-il, en bonne intelligence, quoique les intérêts de chacun soient souvent opposés.

Le village est construit sur six collines en bordure du Sarikol ; la plus élevée est couronnée par une forteresse à l’aspect imposant, mais dont le mur en torchis ne paraît pas très solide. C’est là qu’habite le mandarin que nous irons voir tout à l’heure. Sur les autres mamelons : le poste russe, la maison du consul britannique et plusieurs groupes d’habitations bien misérables. On me montre des murailles en ruines qui auraient été construites par un détachement de l’armée d’Alexandre ; j’y vois des traces de fouilles récentes qui, me dit le guide, ont amené la découverte d’armes et de monnaies des plus curieuses. Pour nous, nous ne rencontrons dans ces vestiges d’une civilisation disparue qu’un jeune lièvre qui est tué par Enselme.

À midi on monte à cheval pour se rendre au Yamen : nous y sommes reçus par un noble seigneur d’aspect chétif, mais à l’œil intelligent, qui parle couramment le russe. Il sera donc facile de causer avec lui par l’intermédiaire de Zabieha.

L’Amban, après les salutations d’usage, proteste de sa bonne volonté entière à nous aider de tout son pouvoir. Autour de lui sont réunis les principaux chefs de la région avec lesquels on va discuter les divers itinéraires possibles. Le Beg de Toung, un géant à figure de brute, affirme sur la tête de ses aïeux que nous ne pourrons trouver aucun moyen de transport, aucun radeau, pour franchir le Raskem en amont de Yarkand et qu’à cette époque de l’année, passer le fleuve à cheval est impossible. Force nous est de renoncer à prendre l’itinéraire de M. Dauvergne et, quoiqu’il nous en coûte, nous décidons de suivre les
UNE DES TOURS DE YAKKA-ARIK.

LE MISÉRABLE REFUGE OÙ NOUS AVONS PASSÉ LA NUIT, APRÈS LE PASSAGE DU KOK-MOUÏNAK.
conseils des indigènes et de gagner Yarkand par le sentier qui traverse les contreforts du Mouz-Tagh-Ata.

Le lendemain nos hommes, après des discussions comme toujours sans objet, se décident enfin à charger les bagages, et nous pouvons, vers huit heures, nous mettre en route. En tête marche le maire de Tourlan-Chah qui a reçu de l’Amban l’ordre de nous guider et de veiller sur nos précieuses personnes.

La caravane serpente entre les boutiques du bazar, passe au pied de la forteresse chinoise et suit la rive gauche du Sarikol au milieu de prairies parsemées de fleurs. Arrivé devant un curieux tombeau — Langar-Mazar — l’officier russe, qui avait eu la charmante attention de nous accompagner, met pied à terre et l’on se dit adieu, après une cordiale poignée de main et des souhaits réciproques.

Nous sommes bientôt dans un joli vallon où se dressent de nombreuses yourtes ; les Kirghizes ont étendu sur l’herbe le plus beau de leurs tapis à notre intention et nous devons, pour ne pas les froisser, nous asseoir un instant et boire quelques bols de koumis. Mais il faut se hâter, car l’étape sera longue ; un sentier de chèvre, grimpant au milieu d’éboulis, nous amène sur un plateau chauve et pierreux où ne croît pas un brin d’herbe, où les buissons épineux même ne poussent pas. Devant nous, les ondulations du terrain s’abaissent lentement jusqu’à la plate-forme bleuâtre de laquelle surgit, dans sa majesté toute blanche, la colossale pyramide du Mouz-Tagh-Ata. Il est là, ce Père des montagnes, comme suspendu entre le ciel et la plaine, tous deux d’un bleu presque pareil, et il fait songer à quelque immense cerf-volant qui attendrait pour reprendre son vol la fraîche brise de chaque soir…

Quelques kilomètres de marche sur ce glacis désert et nous voici tout à coup à l’entrée d’une gorge étroite, où coule un torrent qui dévale de la passe de Kok-Mouïnak. Malgré l’aspect peu engageant de la vallée, nous l’attaquons de pied ferme, dans l’espoir que le pittoresque viendra compenser les difficultés de la route ; mais celles-ci sont des plus sérieuses. Nous ne nous sommes pas encore trouvés aux prises avec un tel chaos de pierres éboulées, sur un sol instable semé de crevasses et de ravins. Pendant plusieurs heures, nos chevaux haletants grimpent en s’accrochant des sabots aux rochers, glissent, retombent, recommencent d’un nouvel effort, et il nous faut parfois les soutenir pour les aider à franchir un passage difficile. Pour comble d’infortune, un troupeau de yaks, venant en sens inverse, apparaît brusquement au point le plus critique et met le désordre dans la caravane.

Cependant le soleil baisse, le vent fraîchit, et quand nous parvenons au Kok-Mouïnak après cette pénible ascension, nous sommes transis de froid et brisés de fatigue. Le baromètre donne 4 620 mètres d’altitude ; à droite et à gauche, des falaises de schiste
NOS BAGAGES SONT CHARGÉS SUR DES YAKS AU DÉPART DE TOR-BACHI.
peu élevées sur lesquelles on aperçoit quelques plaques de neige. Nous descendons rapidement vers une plaine à l’aspect désolé où ne se devine aucune habitation. Comment passerons-nous la nuit ? il est six heures et le brouillard monte… Tout à coup du milieu d’un nuage sort, comme le bon génie des contes de fées, un affreux petit vieillard qui niche, paraît-il, non loin de là, dans une tanière dont il veut bien nous faire les honneurs. Nous y arrivons à sept heures, gelés et mourant de faim ; un beau feu d’argol[7], une excellente soupe au lait nous raniment, mais il nous faut coucher dans un taudis horrible dont la coupole s’est écroulée récemment et, malgré les peaux de moutons, le givre nous fait grelotter. Ce lieu de délices a nom Tchi-Tchag-Lik (4 325 mètres).

La nuit a été mauvaise, tout le monde a souffert de l’altitude et du froid. Au départ, une mince couche de neige recouvre le sol, mais les rayons d’un clair soleil ont vite fait de réchauffer l’atmosphère. Nous voici bientôt au col de Tor-Bachi et, par une vallée plus large et moins sauvage que celle d’hier, nous descendons jusqu’à un groupe de yourtes où l’on nous fait l’accueil le plus aimable. Il faudra malheureusement passer ici la journée, car des yaks nous sont nécessaires pour transporter nos bagages jusqu’à la prochaine étape, et les Kirghizes qui sont partis les chercher dans la montagne ne reviendront pas avant le coucher du soleil.

1er août. — Le Beg Mollah-Ibrahim a pu réunir treize yaks dont les grognements nous mettent sur pied de bonne heure ; sitôt le chargement terminé, en route pour les gorges du Tang-i-Tar. À 4 kilomètres environ de Tor-Bachi, les difficultés commencent et l’on grimpe une ancienne avalanche aux pentes rapides qui barre complètement la vallée. On redescend ensuite dans la rivière dont les eaux font un bruit de cataracte et, suivant son lit au milieu de cascades et de rochers, on avance péniblement. Les malheureux yaks sont secoués, bousculés, jetés les uns contre les autres, au milieu des tourbillons qui éclaboussent et font glisser le sol caillouteux qui fuit sans cesse sous leurs pas ; quant à leurs conducteurs, admirables d’adresse, ils sautent de roche en roche avec une précision et une souplesse de félin. Notre guide Mollah-Ibrahim se prodigue et, grâce à lui, nous sortons sans accident des plus mauvais pas.

Mais quel dommage vraiment que le souci de notre propre sécurité m’empêche de contempler à loisir le décor qui est admirable ! De tous côtés s’élèvent, comme sculptés dans la pierre, des portiques, des tours, des mâchicoulis… Là, c’est un pont naturel qui dresse à des hauteurs prodigieuses son arche de granit. Plus loin, c’est une source chaude qui jaillit des flancs de la roche en projetant d’épais nuages de vapeur où tremble une multitude de petits arcs-en-ciel… Le spectacle est d’une grandeur majestueuse, et pourtant c’est avec la plus vive satisfaction que nous quittons
NOS MALHEUREUX YAKS DANS LES CASCADES DU TANG-I-TAR.
ce terrible Tang-i-Tar, effroi des rares caravanes qui vont pendant l’été de Yarkand à Tasch-Kourgan[8].

Quelques yourtes montrent leurs toits de feutre au milieu de la vallée ; dans l’une d’elles on prendra le thé pendant que nos hommes déchargeront les yaks. Nous disons au revoir à cet excellent Mollah-Ibrahim qui, le malheureux, va passer une seconde fois le Tang-i-Tar, et sitôt notre caravane prête, nous recommençons à grimper pour atteindre le col de Teri-Art, déjà visible sur la crête d’une immense muraille rocheuse. La montée paraît si longue et si difficile que j’hésite à continuer, mais les caravaniers se déclarant capables de franchir la passe aujourd’hui, nous ascensionnons l’escalier gigantesque qui se dresse devant nos pas. Les chevaux font peine à voir ; il faut s’arrêter souvent pour les laisser souffler et c’est après beaucoup de haltes, plus fréquentes à mesure qu’on approche du sommet, que nous mettons pied enfin sur l’arête. Nous sommes à 4 030 mètres, la vue est superbe, mais que nous importe à ce moment le paysage ! il faut sortir de là… et nous dégringolons bien vite les pentes escarpées en tenant nos chevaux par la bride.

Une surprise agréable nous attendait au pied du col : dans un repli de terrain, deux âniers se préparent à camper pour la nuit ; ils ont avec eux un chargement de melons et d’abricots que nous mettons au pillage, après avoir couvert d’or les propriétaires ébahis de cette aubaine. À la nuit tombante seulement nous arrivons au mazar de Tchil-Goumbaz dont le karaoul nous offre l’hospitalité dans sa misérable chaumière.

Le lendemain, dès le départ, nous avons la sensation toute nouvelle de voyager à travers une vallée d’Europe. Nos chevaux avancent au milieu des blés et des avoines parsemés de coquelicots ; de loin en loin, des maisonnettes à toit plat s’abritent sous de grands peupliers et des chèvres par centaines broutent le long des pentes… Cependant, malgré tout le charme de cette nature qu’on sent vivre, la route à cause de la chaleur étouffante semble longue, et lorsque après une marche de 40 kilomètres nous arrivons au hameau de Bagh, la satisfaction de chacun est évidente.

Derrière la maison de notre hôte, un groupe d’abricotiers étend son ombre bienfaisante et nous ne résistons pas au plaisir de nous allonger sur de grands tapis aux brillants ramages où nous rejoignent bientôt tous les notables de l’endroit. Iskandar ne manque pas l’occasion de faire montre de sa science, et la soirée s’écoule charmante à écouter la parole de ces beaux vieillards, pendant qu’autour de nous les enfants font la cueillette et que les hirondelles coupent de leurs zigs-zags rapides un ciel ouaté de rose.

3 août. — Aujourd’hui les arbres poussent nombreux dans l’étroite vallée que suit la route. Partis aux premières lueurs du jour, nous arrivons vers midi devant une petite maison entourée de trois grands
COLONNADES DE ROCHERS ROUGES DANS LA VALLÉE D’ARPALIK.

DANS LES CONTREFORTS DU MOUZ-TAGH-ATA. VUE PRISE DU KARA-DAVAN À 2 870 MÈTRES.
peupliers où notre guide de Tasch-Kourgan, Aoul-Beg, veut absolument nous faire pénétrer ; elle a nom Kaïz-Karaoul. Mais c’est en vain qu’on appelle et qu’on frappe à coups redoublés ; la demeure reste close et nous sommes bientôt certains que son propriétaire est absent. Il faut pourtant nous mettre à l’abri d’un soleil brûlant et trouver des provisions pour le déjeuner ; sur les conseils d’Aoul-Beg qui représente ici l’autorité, Iskandar monte debout sur son cheval, franchit le mur de la cour et, de l’intérieur, ouvre cette première porte. Quant à la seconde, celle du logis, nous l’enfonçons le plus discrètement du monde. Un instant après, nos bagages étaient installés dans la maison du karaoul, une douzaine d’œufs vivement dénichés et trois jeunes poulets prêts à être mis à la broche. Sur le tard, revenant d’une course dans la montagne, notre hôte malgré lui se montre sur le seuil et, nullement étonné de trouver sa maison quelque peu cambriolée, il se contente de sourire avec une philosophie toute chinoise.

De grand matin, nous quittons le vieux karaoul après l’avoir largement indemnisé et nous nous engageons presque aussitôt dans une gorge sauvage au fond de laquelle roule une cascade. Là commence l’ascension d’une muraille rocheuse que les chevaux mettent une heure à franchir. Dégringolant plusieurs fois avec leurs charges, ils n’arrivent au sommet que grâce à de braves Kirghizes qui descendaient le Yamond-Tars, ou « Mauvais pas », avec une caravane de bourriquets et qui s’offrent d’eux-mêmes à nous aider.

On continue à grimper, au milieu d’un décor de plus en plus sombre, par un mauvais sentier qui conduit au Kara-Davan[9], ou « Col noir » ; deux heures de marche nous amènent ensuite au Kizil-Davan[10] ou « Col rouge », percé dans un amas de roches couleur de pivoine. Il fait une chaleur atroce et la fatigue commence à se faire sentir, aussi décidons-nous de faire halte à l’ombre d’une falaise et d’y attendre en déjeunant que le soleil ait baissé à l’horizon… Pendant que nous mettions à mal le troisième poulet du karaoul de Kaïz, déplorant l’absolue sécheresse de ce désert de pierres où ne chante aucune source, nous voyons apparaître deux Kirghizes à cheval, porteurs d’outres remplies de lait ; on pense avec quel enthousiasme ils sont accueillis et, comme une bonne nouvelle n’arrive jamais seule, ils nous annoncent que la maison du karaoul d’Arpalik, but de notre étape, est à quelques portées de fusil seulement.

La soirée est merveilleusement belle : le ciel a mis tous ses diamants et la pleine lune éclaire d’une lumière de rêve les escarpements gigantesques au pied desquels nous campons.

5 août. — Aujourd’hui le sentier descend le long du torrent d’Arpalik, dans un défilé rocheux des plus pittoresques où l’on entend de toutes parts rappeler des compagnies de perdreaux. On pénètre ensuite
LA FEMME ET LA FILLE DU KARAOUL D’ARPALIK.
dans une vallée plus large mais tout aussi désertique ; à droite et à gauche des rochers si rouges qu’on les dirait teintés de sang dessinent comme de gigantesques cathédrales. Sur le sol, d’énormes blocs aux formes fantastiques — lions, dragons ailés, licornes — peuplent étrangement la solitude de cette gorge infernale. Il semble qu’un troupeau formé de tous les animaux de la création, et fuyant devant quelque cataclysme, s’est trouvé là pétrifié dans sa marche, aux premiers temps du monde.

La soif nous gagne dans ce désert brûlant et nous allons, faute de mieux, nous partager une pastèque achetée sur la route à des caravaniers, quand nous apercevons dans une anfractuosité de la muraille rocheuse une maisonnette à toit plat : c’est celle du karaoul d’Yalgouz-Tograk[11]. Nous y sommes reçus par deux Chinois dont l’un est fortement intoxiqué d’opium. Sous le porche, des petits Célestes, nus comme la Vérité, jouent avec un jeune chien…

Le lendemain, Iskandar nous éveille avant l’aube et nous pénétrons dès le départ au travers d’un véritable brouillard de poussière. Toujours les mêmes colonnades de roches sanglantes pendant près de quinze kilomètres. C’est une vallée morte : pas un oiseau, pas la plus petite herbe verte. Puis c’est la montée par une sente aisée entre des cônes de sable gris, jusqu’à un col qui ouvre sur une plaine de gravier noir, plate, sèche, effroyablement fastidieuse. On passe deux larges lits de rivière, desséchés tous les deux, où quelques buissons rabougris hérissent leurs épines. Rien n’est moins engageant que cette contrée solitaire. Il y a tant de poussière dans l’air que le soleil n’est pas visible et qu’il nous faut arriver à près d’un kilomètre de Yakka-Arik pour apercevoir les arbres de l’oasis.

Deux grandes tours pyramidales, sentinelles muettes, surveillent l’immense plaine par laquelle nous arrivons. Le chemin passe à leur pied, franchit un gros torrent sur un pont de bois et, brusquement, l’effroi de la solitude s’évanouit, le désert cesse : c’est pour nos yeux brûlés la joie reposante des champs de maïs et des bosquets de saules. Sur la gauche, une enceinte fortifiée assez curieuse, flanquée de deux tourelles avec mâchicoulis : plus loin, la maison du karaoul chinois où notre caravane est installée.

Nous visitons la forteresse. C’est un vieux poste abandonné, rempli de logements en ruine. Tout au fond, l’ancienne demeure du commandant : les murs en sont encore couverts de ces grandes affiches rouges portant, en caractères chinois, les maximes de Confucius et les formules qui chassent le mauvais sort. Autour de la maison, d’immenses peupliers ondulent sous la brise, protégeant de leur ombre centenaire un fouillis charmant de pavots, de soucis et de roses trémières… Et devant ces allées envahies par les herbes folles, devant ces fenêtres closes sans doute
UNE RUE À YARKAND.
pour l’éternité, je ne puis m’empêcher de songer au joli conte de La Belle au bois dormant.

Nous terminons la promenade par un bain dans une eau rapide qui rafraîchit délicieusement. C’est l’heure apaisée du soir, la chaleur se fait moins brûlante et le ciel d’un rouge vif met comme des reflets d’incendie sur les deux hautes tours qui nous dominent. D’ici, leurs silhouettes grises paraissent couronnées de flammes ; elles font penser à ces autels mazdéens du temps de Zoroastre que dans les plaines de l’Iran édifaient les peuples adorateurs du feu.

Après dîner, la chaleur est vraiment trop pénible pour dormir ; je vais revoir au clair de lune les ruines de la forteresse chinoise. L’oasis est calme, tout repose ; de l’autre côté de la rivière on entend crier les chacals, et dans les peupliers qui bruissent au vent du soir, un rossignol égrène les notes perlées de sa chanson… Assis sur un vieux banc de pierre, je rêvais aux choses du passé quand Iskandar est venu brutalement me rappeler à la réalité en m’annonçant que les caravaniers partaient pour Yarkand et qu’ils sollicitaient des ordres.

7 août. — Nous sommes debout au lever du soleil afin de franchir la courte distance qui nous sépare encore de Yarkand avant les heures chaudes du jour. C’en est fini des plaines grises, des vallées de granit ; aujourd’hui notre petite caravane chemine au milieu de vertes oasis, par des sentiers ombreux bordés de saules et de micocouliers. Un village nous accueille au détour de la route ; c’est jour de marché et le grouillement du bazar avec ses hommes à la longue tunique, ses femmes voilées de blanc, ses enfants aux vestes multicolores, nous charme et nous amuse. Nos chevaux, habitués au grand calme des solitudes, sont un peu affolés et nous avons le plus grand mal à traverser cette foule bruyante sans écraser personne.

Mais voici qu’arrive à notre rencontre un superbe cavalier qui met pied à terre et se précipite vers moi, tendant sa main brune dans le creux de laquelle est une roupie[12]. Il est envoyé par la colonie hindoue de Yarkand qui nous attend plus loin.

En effet, devant un petit caravansérail, le soleil cru éclaire un groupe d’Indiens vêtus de blanc. Le plus âgé s’avance et m’apporte à son tour, avec une grâce tout orientale, le salut de la roupie. Nous promettons à ce beau vieillard de lui rendre ce soir sa visite, et continuons rapidement notre route. Vers onze heures, les jardins fleuris et les cimetières aux larges dalles se font de plus en plus nombreux. Un pont de pierre, puis la haute muraille de la ville dont les créneaux se découpent en blanc sur l’azur foncé du ciel ; nous sommes à Yarkand. Et maintenant c’est un labyrinthe de ruelles couvertes, bordées de boutiques innombrables. On fait halte devant le Yamen du mandarin ; Aoul-Beg notre fidèle guide pénètre seul dans le palais, nous laissant à la porte au milieu des prisonniers chargés de lourdes chaînes. Le voisinage n’est pas des plus réjouissants et nous commençons à trouver l’attente pénible… Heureusement qu’Aoul-Beg revient nous arracher à ce triste spectacle pour nous conduire, par ordre de son chef, dans la demeure d’un riche seigneur, jolie et vaste maison à la mode chinoise où nous serons très confortablement logés.

L’après-midi, l’Amban nous fait dire qu’il nous recevra le lendemain à trois heures et demie. Il nous envoie un mouton, des poulets, du riz, du maïs… et sa montre pour régler la nôtre afin que nous soyons exacts au rendez-vous.

Nous sortons pour aller rendre visite à l’Aksakal hindou. Une odeur nauséabonde de melon pourri est répandu dans toute la ville qui a vraiment l’aspect d’un centre pestilentiel, avec ses bassins d’eau croupie et ses habitants aux figures hâves et fiévreuses, dont beaucoup ont des goîtres énormes. Au moment où nous pénétrons sous son toit, le chef de la colonie hindoue rend la justice d’un air grave et patriarcal : c’est l’heure à laquelle, toutes les transactions de la journée étant finies, on vient demander à son expérience de régler les cas difficiles. L’Aksakal interrompt son office à notre entrée et renvoie tous les assistants ; après quoi il nous offre le thé. Je réponds à son amabilité en lui tendant une cigarette. Le vieillard accepte de fort bonne grâce, mais comme la religion hindoue interdit non seulement de manger ou de boire chez un étranger, mais même de toucher des doigts ou des lèvres quoi que ce soit lui appartenant, il fume la cigarette à travers la fente étroite de sa main fermée, sans approcher le papier de riz de sa bouche.

En rentrant nous trouvons le chef de nos caravaniers qui vient se faire régler définitivement, car ses hommes, ses bêtes et lui-même sont à bout de forces et cette fois, déclare-t-il, ils n’iront pas plus loin. Comme nous sommes sûrs de pouvoir former une nouvelle caravane à Yarkand, nous n’insistons pas davantage pour l’engager à nous suivre, et je me hâte de lui payer l’argent que je lui dois, ravi au fond de ne plus rien avoir à faire avec ce peu intéressant personnage. Une surprise plus désagréable m’attend le même soir. Mon ami et compagnon de route Enselme reçoit une lettre de France qui l’oblige, pour des raisons de famille, à regagner Paris par le plus court chemin. Zabieha seul me reste, mais le connaissant comme je le connais maintenant, je suis sûr avec lui de mener à bien mon expédition.

Le lendemain, à l’heure dite, nous montons en selle pour nous rendre chez l’Amban. Une foule grouillante comme de la vermine circule à travers les rues et nous heurtons au passage d’innombrables petits ânes chargés de melons, de briques et de bottes de foin. On nous reçoit en grande cérémonie : le mandarin, revêtu de sa plus belle robe, nous offre un repas gargantuesque que la chaleur torride nous disposerait plutôt à éviter. Mais hélas ! il faut faire contre mauvaise fortune bon cœur et manger en conscience les vingt ou trente plats du menu, cependant que des boys, aux longues tuniques bleues, agitent en cadence de larges éventails en plumes de vautour.

Rendus sur le tard au calme de notre demeure, nous éprouvons une véritable joie à nous étendre dans la cour sur de beaux et confortables tapis. L’heure est exquise ; dans le charme de cette journée à son déclin, j’admire les délicates colorations d’un ciel où vont apparaître les étoiles. Peu à peu, le crépuscule jette son voile sur les clartés roses du couchant ; des pensées mélancoliques traversent mon esprit. Je songe que demain, sans doute, je verrai s’éloigner un ami de vieille date et je m’attriste de cette séparation prochaine.

Maintenant la nuit est tout à fait venue. Un fin croissant de lune monte au-dessus de la mosquée voisine et, tandis que s’éteignent dans l’air moins brûlant du soir les derniers appels de la prière, il me semble entrevoir déjà, dans un lointain de rêve oriental, toute la magie de ces Indes merveilleuses que nous allons essayer d’atteindre par delà les mornes solitudes du Karakoroum.

  1. Littéralement : Bouches du Beïk.
  2. Titre donné dans le Turkestan aux mandarins chinois qui administrent le territoire.
  3. 3 630 mètres d’altitude.
  4. Fouet kirghize.
  5. « Colline de pierres » — 3 150 mètres d’altitude.
  6. Cartes de visite chinoises qu’Enselme et moi avions conservées de notre voyage en Mandchourie.
  7. Crottin de yaks.
  8. Pendant l’hiver, la baisse des eaux permet de suivre constamment la vallée du Sarikol.
  9. 4 870 mètres d’altitude. Ce passage doit son nom à la montagne environnante qui est tout entière d’un schiste ardoisier, ayant un peu l’apparence du charbon.
  10. 3 140 mètres d’altitude.
  11. 2 140 mètres d’altitude.
  12. Coutume hindoue qui veut que l’on n’aborde pas un supérieur les mains vides. La personne à qui cet hommage est rendu touche du doigt la roupie et la connaissance est faite.