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Correspondance de Lagrange avec d’Alembert/Lettre 168

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Texte établi par Ludovic LalanneGauthier-Villars (Œuvres de Lagrange. Tome XIIIp. 370-371).

168.

D’ALEMBERT À LAGRANGE.

À Paris, ce 14 décembre 1781.

J’ai reçu, mon cher et illustre ami, votre dernière Lettre par M. le baron de Bagge. Je n’y ai pas répondu plus tôt parce que je n’avais rien d’intéressant a vous mander, et que je respecte vos moments, mieux employés qu’à lire mes fadaises. Cependant, vous trouverez ci-joint un mot que je vous prie de faire insérer dans le prochain Volume de votre Académie, s’il est possible. C’est peu de chose, et c’est à peu près tout ce que je puis faire à présent en Mathématiques ; mais c’est une petite correction pour les Mémoires de Berlin de 1746, et pour mon septième Volume d’Opuscules[1].

Je vous félicite d’avoir pu reprendre avec l’automne vos profonds travaux, et j’attends avec grande impatience vos belles recherches sur la libration de la Lune. Quoique je ne sois plus guère capable d’application, je ferai un effort pour lire ce Mémoire intéressant. J’ai reçu les paquets que vous m’avez envoyés, et je les ai remis à leur destination. Je me suis aussi acquitté de vos commissions pour M. de Condorcet. Il m’a dit que vous recevriez incessamment les Volumes de l’Académie qui vous manquent, et que peut-être vous avez maintenant reçus. Vous avez bien raison d’en aimer la partie historique[2]. Les Éloges surtout sont très-intéressants et sont entendus avec le plus grand plaisir à nos séances publiques.

Le marquais Caraccioli est arrivé à Palerme en bonne santé le 15 octobre et a été parfaitement bien reçu. Je n’ai point encore de ses nouvelles directes, mais j’ai tout lieu de croire qu’elles sont bonnes et que sa santé même s’affermira dans ce beau pays. Son adresse est Vice-Roi de Sicile, à Palerme. Il sera sûrement fort aise de recevoir de vos Lettres.

Je ne sais si le nombre des géomètres diminuera bientôt, comme vous le croyez mais il suffira, pour l’avancement des sciences, qu’il y en ait un seul qui vous ressemble.

Adieu, mon cher et illustre ami ; je vous renouvelle, pour l’année qui va commencer, l’assurance de tous les sentiments que je vous ai voués depuis si longtemps et dont je me flatte que vous êtes bien persuadé. Ma santé serait en ce moment assez passable si le sommeil était meilleur. Je me consolerai du moins si la vôtre est telle que je le désire et que je l’espère. Je vous embrasse aussi tendrement que je vous aime et aussi sincèrement que je vous honore.


  1. Cette petite correction figure dans le Volume de 1780 (p. 376-378), sous le titre Extrait d’une Lettre de M. d’Alembert à M. de la Grange, du 14 décembre 1781.
  2. La partie historique des Mémoires de l’Académie et les Éloges sont faits par Condorcet.