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Correspondance de Voltaire/1762/Lettre 5005

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Correspondance : année 1762GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 42 (p. 208-209).

5005. — À M. LE MARQUIS DE CHAUVELIN[1].

La tragédie des Calas, et celle qui se joue depuis Pétersbourg jusqu’en Portugal, ne m’ont pas fait abandonner la famille d’Alexandre[2]. Je n’ai pas cru devoir laisser imparfait un ouvrage sur lequel vous avez daigné m’honorer de vos conseils : vous m’avez rendu chère cette pièce à laquelle vous avez bien voulu vous intéresser. Si jamais il vous prend envie de la relire, vous n’avez qu’à commander. Pierre Corneille m’occupe encore plus que Pierre Ulric. C’est une terrible tâche que d’être obligé d’avoir toujours raison dans quatorze tomes[3].

Il faut donc renoncer à l’espérance de voir Vos Excellences dans nos jolis déserts. Cependant le théâtre est tout prêt ; et quand madame l’ambassadrice voudra faire pleurer des Allobroges, il ne tiendra qu’à elle. Il faudra que mademoiselle votre fille joue Joas dans Athalie, et moi, si l’on veut, je serai le confident de Mathan,


Qui ne sert ni Baal ni le dieu d’Israël.

(Racine, Athalie, acte III, scène iii.)

Ma piété en sera effarouchée ; mais il faut se faire tout à tous.

Que Votre Excellence me conserve ses bontés ; j’en dis autant à madame l’ambassadrice, à qui ma nièce présente la même requête.

  1. Cette lettre avait été cousue à la précédente. Nous rétablissons sa suscription.
  2. C’est ainsi que Voltaire désigne sa tragédie d’Olympie.
  3. L’édition du Théâtre de P. Corneille avec des commentaires n’eut que douze volumes.