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Correspondance de Voltaire/1762/Lettre 5018

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Correspondance : année 1762GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 42 (p. 218-219).

5018. — À M. GOLDONI.
Aux Délices, près de Genève, 28 auguste.

Adasio un poco, caro sior : cosa che avete ditto che avete una moglie al lato, vol dir che siete un contade perfetto. Basta che il sior e la siora moglie sarebbero stati ricevuti con ogni rispetto, e col più gran zelo nelle mie capanne, e che la via di Ginevra è cosi bella come quella di Lione ; e che mi dispiace che la sia disgustada, e che non abbia avù la volontà di vegnir, e xe un pezzo che l’aspettava, e che io vo mi ramaricando ; vardé, che cosa fa di non aver preso la via di Ginevra ; vardé, che bisogna che diga tutto, e po vedrà se le cose van ben.

Volete dunque, mio caro sior, sanar la piaga che mi fate, coll’ onore della vostra dedicazione[1], ma se questa gloria innalza il mio spirito, e lusinga la vanità mia, il dolor di non avervi tenuto nelle mie braccia non è meno acerbo nel mio cuore. Leggero le vostre vezzose commedie fino al giorno che potrô riverire l’autore.

Non so dove siete adesso. Non so come indirizzare la mia lettera. Ma il vostro nome basta ; c mi confido che siete già conosciuto à Parigi come à Venezia. Non ho ancora ricevuto il regalo che mi accennate. Ma non posso differire i miei ringrazianienti.

Giacchè siete, o sarete ben presto cittadino di Parigi, vorrei farvi una visita, ma il Corneille non lo permetterà. Mi ritrovo fra il Corneille e il Goldoni. Stampero l’uno, e aspettero l’altro quando egli ritornerà a rivedere la sua bella Italia. Ma di grazia non mi deludete più colle illusioni della speranza.

Addio ; vi stimo, vi onoro, vi amo senza illusione veruna ; e saro sempre il vostro ammiratore, amico, et servitore[2].

  1. C’est la Pamela maritata que Goldoni a dédiée à Voltaire.
  2. Traduction : Doucement, cher monsieur : en disant que vous avez une femme à votre côté, vous dites que vous êtes un homme parfait. Je n’ajoute rien sinon que monsieur et madame auraient été reçus avec tout respect et les plus grands égards dans mes cabanes ; que la route de Genève est aussi belle que celle de Lyon ; que je regrette que vous y ayez renoncé et que vous n’ayez pas voulu venir ; que je vous attendais il y a longtemps, et que je me plains fort. Voyez ce que c’est que de n’avoir pas pris le chemin de Genève : voyez, car il faut que je dise tout, et puis vous jugerez si vous avez bien fait d’agir ainsi.

    Vous voulez donc, cher monsieur, guérir la blessure que vous me faites en m’honorant de votre dédicace ; mais si cette gloire enorgueillit mon esprit et flatte ma vanité, le chagrin de ne vous avoir pas embrassé n’en est pas moins acerbe dans mon cœur. Je lirai vos charmantes comédies jusqu’au jour où je pourrai saluer l’auteur.

    Je ne sais où vous êtes en ce moment. J’ignore où adresser ma lettre. Mais votre nom suffit ; et je m’assure que vous êtes déjà connu à Paris comme à Venise. Je n’ai pas encore reçu le présent que vous m’annoncez. Mais je ne puis différer mes remerciements.

    Puisque vous êtes ou que vous serez bientôt citoyen de Paris, je voudrais vous rendre visite, mais Corneille ne le permettra point. Je suis entre Corneille et Goldoni. J’imprimerai l’un, et j’attendrai l’autre quand il retournera revoir sa belle Italie. Mais de grâce ne me leurrez plus de vaines espérances et d’illusions. Adieu, je vous estime, je vous honore, je vous aime sans illusion, et serai toujours votre admirateur, ami et serviteur.

    — Voltaire, dans cette lettre, cherche à imiter le dialecte vénitien dans lequel Goldoni a écrit beaucoup de ses pièces, et notamment celles qu’il fit paraître sous le pseudonyme de Polisseno Fegeio, pastor arcade.