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L’Âme des saisons/Prélude

La bibliothèque libre.
Veuve Fred. Larcier, Editeur (p. 63-65).
I


Prélude


Sainte Vierge, à présent c’est votre mois de mai,
C’est votre joli mois, mignard et parfumé,
Qui, assis à vos pieds en robe bleue et blanche,
Egrène en souriant, entre ses doigts jolis,
Le clair rosaire aux grains de nacre et de rubis
Que l’aurore suspend aux branches.
 
Le matin frêle et frais fume sur les collines ;
Et quand le vol léger des cloches argentines
S’élève à l’horizon qu’on voit vibrer un peu,
Les sveltes peupliers, feuillus de feuilles claires,
Ont l’air de soulever le ciel dans la lumière
Ainsi qu’un dais de satin bleu.


Toute la Terre chante et fleure en votre honneur,
O douce Dame ! Au pied de vos autels de fleurs,
Où les cierges neigeux parmi l’encens crépitent,
Les mères en émoi sanglotent à genoux,
Et les fillettes, dans les prés, tressent pour vous
Des couronnes de marguerites.

Mille processions vont à vous, Sainte Vierge,
Avec leurs croix, leurs oriflammes et leurs cierges,
Et les dômes dorés et les clochers aigus,
Dans l’azur sillonné d’hirondelles et d’anges
Sonnent au loin et carillonnent vos louanges
De Kevelaer à Montaigu !
 
Or, puisqu’en ce beau mois votre bonté sourit
Plus lumineusement et console et guérit
Quiconque joint les mains parmi les feuilles vertes,
Puisque, comme de fraîches roses, sur les cœurs,
Vous laissez toutes grâces et toutes faveurs
Tomber de vos deux mains ouvertes,


Permettez qu’à mon tour, ô débonnaire Dame !
Je vous dise humblement les besoins de mon âme
Et les vœux les plus chers que mon cœur a formés,
Afin qu’ayant ainsi spécifié les choses,
Je reçoive, du geste clair de vos mains roses,
Mes étrennes du mois de mai.


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