Le Jardin du Silence et la Ville du Roy/III/Cette marchande…

La bibliothèque libre.
G. Oudin & Cie (p. 99-100).



VI


La marchande de moules.

Cette marchande avec sa voix et sa balance,
Avec ses paniers clairs qui lui pèsent au bras,
Ne sait que le beau temps et ne se soucie pas
Des hôtels de la rue ni du style de France.

Elle est née vers la mer phocéenne, là-bas,
Dans les Martigues clairs où s’écoula l’enfance
Du Maurras préfacé par Anatole France.
Dès que le messager qui vient et qui s’en va


Fait claquer son long fouet sur la route de Berre,
Elle accourt vigilante, heureuse et la première.
Les coquillages frais lui caressent les mains ;

Elle reçoit en eux le sel et le matin
Qu’elle prie un moment avant que d’aller vendre.

Et comme si son cœur de femme s’en voulait
De ne pouvoir garder tout ce qu’on doit lui prendre
Elle ment en criant : « les moules de Calais !… ».