Le Principe de relativité et la théorie de la gravitation/chap. 11

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DEUXIÈME PARTIE.

LA RELATIVITÉ GÉNÉRALISÉE. GRAVITATION ET ÉLECTRICITÉ.

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CHAPITRE XI.

LE CHAMP DE GRAVITATION.


52. Conditions d’application du principe de relativité restreint.

Une conception fondamentale est à la base de la théorie de la relativité restreinte : celle du mouvement rectiligne et uniforme.

Cette notion doit être précisée car il semble que l’état de mouvement rectiligne et uniforme n’ait pas de sens absolu. S’il est légitime de parler d’un système en mouvement rectiligne et uniforme par rapport à un autre, quel critérium a-t-on pour décider si un système envisagé isolément est ou non en translation uniforme ?

Voici dans quel sens on peut répondre à la question. Nous supposons qu’on peut trouver un système tel que, dans ce système, la loi d’inertie de Galilée soit exacte : Un point matériel sur lequel n’agit aucune force appliquée se meut d’un mouvement rectiligne et uniforme ; cela signifie : dans ce système nous envisageons des corps de référence ou des axes de référence, immobiles par définition ; un point matériel sur lequel n’agit aucune force appliquée se déplace d’un mouvement de translation uniforme par rapport à ces corps ou axes. En d’autres termes encore, il ne règne dans ce système aucun champ de force d’inertie. Cette définition seule a un sens précis.

Un tel système est dit système galiléen, et d’autres systèmes sont également des systèmes galiléens s’ils sont animés par rapport à d’un mouvement de translation uniforme, sans rotation.

Le principe de relativité restreint n’envisage que des systèmes galiléens. Il affirme que dans tous ces systèmes les lois de l’électromagnétisme exprimées par les équations de Maxwell-Lorentz sont exactes ; que la lumière se propage avec la même vitesse dans toutes les directions, étant une constante universelle ; qu’on peut faire une mesure optique du temps ; que, d’une façon générale, les lois des phénomènes sont les mêmes.

Un espace-temps pouvant contenir dans toute son étendue une infinité de systèmes galiléens est un Univers de Minkowski (Chap. VI). Il est régi par les lois de l’électromagnétisme sous leur forme habituelle. Nous le qualifierons d’euclidien à cause de l’analogie (no 26) entre l’état de mouvement rectiligne et uniforme, c’est-à-dire entre la droite d’Univers dans l’espace-temps quadridimensionnel, et la ligne droite dans l’espace tridimensionnel de la géométrie euclidienne[1]. Comme cet espace, l’Univers de Minkowski est infini.

Dans l’étude de la relativité restreinte, nous avons totalement négligé le champ de gravitation. Cependant, dans la réalité des choses, dans l’Univers réel, la gravitation s’exerce partout et agit sur toute portion de matière. Agit-elle aussi sur l’énergie et ne vient-elle pas détruire l’homogénéité, qui est caractéristique de l’Univers de Minkowski ?

53. La pesanteur de l’énergie.

La dynamique de la relativité restreinte a pour conséquence la loi, vérifiée d’ailleurs par l’expérience, de l’inertie de l’énergie, mais n’implique pas a priori que l’énergie soit pesante.

Une question capitale se pose donc : la pesanteur est-elle, comme l’inertie, une propriété de l’énergie ? Est-elle liée à l’inertie ? Lorsque la masse inerte d’un corps change avec son énergie totale, en est-il de même de la masse pesante ?

L’expérience répond par l’affirmative[2]. Supposons qu’une perte d’énergie par rayonnement, d’où résulte une variation proportionnelle de la masse inerte, ne s’accompagne d’aucune variation de poids ; il en résulterait qu’une certaine quantité d’uranium et l’ensemble des produits de sa transformation, hélium et plomb, auraient des poids égaux mais des masses différentes, et par suite ne prendraient pas la même accélération sous l’influence de la pesanteur. Il devrait exister, en un même lieu, pour l’uranium et le plomb, une différence dépassant 1/10000 dans les valeurs de l’accélération due à la pesanteur.

Or les expériences de M. Eötvös ont établi que l’accélération de la pesanteur est, en un même lieu, la même pour tous les corps. Cette vérification a été faite au moyen de la balance de torsion, qui a permis de constater que la direction de la verticale est exactement la même pour tous les corps : cette direction est celle de la résultante du poids et de la force centrifuge due à la rotation de la Terre ; comme la force centrifuge est proportionnelle à la masse inerte, si le poids n’était pas proportionnel à cette masse, la verticale n’aurait pas la même direction pour tous les corps. La constance du rapport entre le poids et la masse inerte a été vérifiée avec une précision qui dépasse le vingt-millionième : nous sommes loin d’écarts supérieurs au dix-millième.

Nous avons vu, d’autre part, que les petits écarts des masses atomiques résultent vraisemblablement de variations d’énergie interne lors de la formation des atomes (P. Langevin). Nous pouvons remarquer que ces écarts se constatent par des mesures de poids.

Nous sommes donc amenés à conclure que l’énergie est pesante et qu’il y a, dans un champ de gravitation déterminé, proportionnalité exacte entre le poids et la masse inerte de l’énergie.

Il était donc naturel d’admettre que l’énergie rayonnante, en particulier la lumière, est pesante, et l’on devait penser qu’un rayon lumineux s’incurve dans un champ de gravitation.

Einstein a d’abord appliqué la loi de Newton[3] ; le calcul de l’angle des asymptotes de la trajectoire hyperbolique suivie par un mobile, dont la vitesse à grande distance du Soleil serait a conduit au résultat suivant : un rayon lumineux dont la trajectoire passerait à la distance minimum du centre du Soleil devrait subir une déviation

étant la constante de la gravitation, et la masse du Soleil. Pour un rayon passant tangentiellement au bord du Soleil, on aurait 0″,87.

Mais la découverte de la loi réelle de la gravitation, faite plus tard par Einstein, a montré que la loi de Newton n’est qu’une approximation pour les faibles vitesses, et que la déviation d’un rayon lumineux doit être le double de la valeur précédente, c’est-à-dire 1″,74. Nous verrons que les observations ont vérifié l’exactitude de la loi d’Einstein.

54. La généralisation du principe de relativité.

La pesanteur de la lumière met pour la première fois la gravitation en liaison avec les phénomènes électromagnétiques. De graves conséquences en résultent.

Pour un observateur lié à la terre, un mobile lancé et abandonné à lui-même ne satisfait pas à la loi galiléenne d’inertie puisqu’il est dévié par la pesanteur (et la force centrifuge composée due à la rotation de la Terre). Nous voyons qu’il en est de même pour la lumière et que par suite la vitesse d’une onde n’est pas — toujours pour l’observateur terrestre — rigoureusement constante sur tout son parcours. La même conclusion s’applique à tous les mondes réels de l’Univers : d’aucun système naturel on ne peut voir — du moins sur une grande étendue un mobile ou même un rayon de lumière se propager suivant un mouvement rectiligne et uniforme ; en un mot, le système galiléen n’est qu’une fiction.

Faut-il donc considérer le principe de relativité comme une abstraction en dehors des réalités objectives ? Doit-on renoncer à cette admirable synthèse et considérer l’invariance des lois de la Nature comme une simple approximation, d’autant meilleure que le système de référence diffère moins d’un système galiléen ?

Peut-on, au contraire, étendre le principe de la relativité au cas d’un système de référence quelconque ?

Einstein n’a pas hésité : il a érigé en principe l’affirmation suivante :

Tous les systèmes de référence sont équivalents pour formuler les lois de la Nature : ces lois sont « covariantes »[4] vis-à-vis de transformations de coordonnées arbitraires.

Les lois de la Physique doivent être telles, qu’elles soient valables dans un système de référence absolument quelconque.

Cette généralisation du principe de relativité s’impose. En effet, toutes les sensations pour lesquelles nous percevons l’Univers sont déterminées par des coïncidences absolues (par exemple la coïncidence d’une onde lumineuse avec notre rétine) ; toutes les lois de notre science sont basées sur la constatation de coïncidences dans l’Espace-Temps. Dans le langage de la relativité, ces coïncidences sont des intersections de lignes d’Univers, absolues et par suite indépendantes de tout système de référence.

Voici une image, due à Eddington[5], qui fait comprendre la question : « Supposons tracé un réseau de lignes d’Univers et imaginons-le placé dans une masse gélatineuse. Si maintenant nous déformons cette gelée d’une manière quelconque, chaque ligne d’Univers se déforme, mais les intersections continuent à se succéder dans le même ordre et aucune intersection supplémentaire ne se trouvera créée. La gelée déformée nous donnera une histoire du monde aussi exacte qu’avant sa déformation, et il n’existe aucun critérium qui nous permette de dire qu’une des deux représentations est préférable à l’autre.

» Supposons maintenant que nous introduisions des divisions de l’espace et du temps, ce que nous pourrions faire en traçant des mailles rectangulaires dans les deux états successifs de la gelée. Nous avons maintenant deux manières de situer les lignes d’Univers et les événements dans l’espace et dans le temps, manière que nous devons traiter sur un pied d’égalité. Évidemment nous ne changeons rien au résultat si, au lieu de déformer d’abord la gelée puis d’introduire des mailles régulières, nous introduisons des mailles irrégulières dans une gelée non déformée. Tous les systèmes de mailles sont donc équivalents. »

Cependant, les effets de l’accélération paraissent contredire le principe généralisé. Par exemple, dans un véhicule un voyageur est renversé par suite d’un coup de frein trop brusque ; c’est là un effet bien réel et si l’on venait dire au voyageur que les lois des phénomènes sont les mêmes quel que soit l’état de mouvement du système, il ne serait pas convaincu. Nous avons déjà insisté sur le fait que l’accélération a une sorte de réalité physique absolue.

Il est donc clair que, dans un système non galiléen, le principe de relativité précédemment étudié ne s’applique pas tel quel. La suite nous montrera que la généralisation du principe nécessite l’introduction, dans chaque système, d’un champ de force appelé par Einstein champ de gravitation — particulier à ce système ; c’est précisément ce champ qui se manifeste se manifeste par les effets mécaniques de l’accélération. Le système galiléen correspond au cas particulier où ce champ disparaît.

55. L’équivalence entre un champ de gravitation et un champ de force dû à un état de mouvement accéléré[6].

Nous allons commencer par l’analyse de notions qui nous paraissent évidentes parce que nous y sommes habitués, et c’est précisément parce que nous y sommes trop habitués que personne, avant Einstein, n’avait eu l’idée de les approfondir.

1o La gravitation doit être une action de proche en proche. — À la question « pourquoi un objet soulevé et abandonné à lui-même tombe-t-il » ? chacun est tenté de répondre parce qu’il est attiré par la Terre. La physique moderne doit formuler la réponse d’une façon différente.

Le développement, dans le domaine de l’électromagnétisme, de la théorie des actions de proche en proche non instantanées a conduit à la théorie de Maxwell et au principe de relativité restreint. Une conception semblable doit être admise pour la gravitation. L’attraction de la Terre sur l’objet qui tombe n’est, en somme, qu’une apparence, car la Terre agit indirectement sur l’objet. D’une façon générale, toute matière ou toute énergie détermine dans son voisinage les propriétés de l’Espace-Temps, produit une modification de l’Espace-Temps qui se manifeste à nous par ce que nous appelons un champ de gravitation. La propriété d’agir sur un objet, ou sur une onde électromagnétique, appartient à l’Espace-Temps modifié par le voisinage de matière ou d’énergie ; ce n’est pas une action à distance directe et instantanée produite par un corps attirant.

2o L’égalité de la masse pesante et de la masse inerte. — Le champ de gravitation possède une propriété excessivement remarquable, qui n’appartient pas aux champs électrique et magnétique. Alors que dans un même champ électrique des charges différentes prennent des accélérations différentes, dans un même champ de gravitation l’accélération acquise par un corps ne dépend pas de la nature du corps. Tous les corps, qu’ils soient lourds ou légers, tombent avec la même vitesse si les conditions initiales sont les mêmes.

Ainsi, dans un champ de gravitation, l’accélération est indépendante de la force qui s’exerce sur le corps.

Ce fait, si familier, est extraordinaire. Nous allons, avec Einstein, le formuler autrement.

D’après la loi du mouvement, on a (pour les faibles vitesses) :

c’est-à-dire que la masse inerte (masse au repos) est caractéristique du corps accéléré.

Si la force est le poids du corps, on a

La masse pesante étant également une caractéristique du corps. Il suit de là :

Puisque l’expérience prouve que, dans un même champ de pesanteur, l’accélération est indépendante du corps, le rapport est une constante indépendante de la nature du corps et si l’on choisit les unités de façon que ce rapport soit égal à l’unité, la masse pesante est égale à la masse inerte et d’autre part l’accélération est égale à l’intensité du champ.

Il y a longtemps que la mécanique a enregistré ce résultat, mais personne ne l’avait interprété. L’interprétation est celle-ci : la même qualité d’un corps se manifeste selon les circonstances, soit comme inertie, soit comme pesanteur ; en termes plus précis : LA FORCE DE GRAVITATION EST UNE FORCE D’INERTIE.

Imaginons une portion d’Univers vide, si loin des étoiles et de toute matière que nous soyons dans le cas idéal où la loi galiléenne d’inertie est applicable. Il est alors possible, dans cette portion d’Univers, de choisir un système galiléen relativement auquel des points immobiles restent au repos, des corps en mouvement sur lesquels n’est appliquée aucune force sont animés d’un mouvement rectiligne et uniforme.

Dans ce système galiléen supposons une chambre isolée, dans laquelle se trouve un observateur muni d’appareils ; pour cet homme, il n’y a pas de pesanteur, pas de direction privilégiée.

Par un câble attaché à un crochet fixé au milieu de la toiture de la chambre, un être extérieur se met à tirer avec une force constante. Pour un observateur immobile dans le système galiléen la chambre commence à être animée d’un mouvement uniformément accéléré et sa vitesse croît d’une façon fantastique. Toute autre sera l’opinion de l’homme enfermé dans la chambre. L’accélération va projeter cet homme sur le plancher ; pour lui, il y aura un « haut » et un « bas », comme dans une chambre sur la Terre ; il constatera la loi de la chute des corps, tous les objets ayant la même accélération ; sa première impression sera qu’il se trouve dans un champ de gravitation.

Cependant, à la réflexion, il sera étonné des effets observés car la chambre devrait tomber en chute libre dans le champ de gravitation, ce qui ferait disparaître la pesanteur. Cherchant ce qui se passe, il découvrira le crochet et le câble tendu : cette fois tout sera clair pour lui, il se dira : ma chambre est suspendue, au repos, dans un champ de gravitation.

Cet homme est-il dans l’erreur ? nullement, car son interprétation est conforme aux lois de la Mécanique. Alors nous pouvons, comme lui, considérer la chambre comme immobile, bien qu’elle soit accélérée relativement à l’espace galiléen la possibilité de cette conception repose sur la propriété fondamentale d’un champ de gravitation de donner à tous les corps la même accélération, c’est-à-dire repose sur l’égalité de la masse pesante et de la masse inerte.

Supposons maintenant qu’à l’intérieur de la chambre, l’homme suspende un corps au bout d’une corde, c’est-à-dire constitue un pendule : la corde se tendra et prendra une direction bien déterminée qui sera « la verticale ». L’homme estimera que la tension de la corde équilibre le poids du corps, que cette tension est déterminée par la masse pesante. Mais, d’autre part, un observateur du système galiléen jugera de la façon suivante : la corde est forcée d’accompagner la chambre dans son mouvement accéléré et transmet ce mouvement au corps suspendu : la tension équilibre la force d’inertie, elle est déterminée par la masse inerte.

3o Le boulet de Jules Verne. — Au lieu d’imaginer que la chambre de l’observateur est loin de toute matière, supposons-la, au contraire, lancée sans rotation et se mouvant en chute libre dans le champ de gravitation d’un astre ; la pesanteur y sera supprimée puisque, dans ce champ, la chambre et tous les objets qu’elle contient seront soumis à une même accélération d’ensemble. Pour l’observateur de la chambre il n’y aura ni haut ni bas, et un mobile libre sera au repos ou animé d’un mouvement rectiligne et uniforme ; la lumière à l’intérieur ou dans le voisinage de la chambre se propagera en ligne droite. En résumé, un système de référence lié à la chambre en chute libre sera un système galiléen (bien que pour un observateur de l’astre sur lequel tombe la chambre le système soit accéléré), et l’homme de la chambre considérera l’Univers comme euclidien dans son voisinage.

4o Le principe d’équivalence. — Il résulte des considérations qui précèdent que, d’une part, l’emploi d’un système de référence en mouvement équivaut à créer un certain champ de gravitation dans lequel ce système pourra être considéré comme immobile ; que, d’autre part, l’emploi d’un système de référence lié à un corps en chute libre dans un champ de gravitation revient à supprimer ce champ.

Dans toute portion d’espace il est impossible de se prononcer entre les deux interprétations suivantes : 1o il existe un état de mouvement, non uniforme, sans champ de gravitation ; 2o le système envisagé est au repos, mais il règne dans la région considérée un champ de gravitation s’exerçant sur toute portion d’énergie.

Il est donc impossible de distinguer un champ de force d’inertie dû à un état de mouvement et un champ de gravitation. Il y a équivalence, selon l’expression d’Einstein.

Cette conception est en plein accord avec un fait bien connu : nous avons déjà dit, à propos des expériences d’Eötvös (no 53) que la verticale est déterminée par la résultante du champ de la pesanteur et du champ de force centrifuge due à la rotation de la Terre. Ces deux constituants du champ terrestre interviennent au même titre dans tous les phénomènes sensibles à leur action. Tout se passe pour un système de référence en rotation comme s’il était en translation dans un champ de gravitation distribué comme le champ de force centrifuge.

56. L’Univers réel n’est pas euclidien.

Pour un observateur en chute libre, dans un boulet de Jules Verne, le champ de gravitation disparaît ; mais il est essentiel de remarquer que c’est seulement dans une région peu étendue (théoriquement infiniment petite) que l’Univers est euclidien pour cet observateur. Le champ de gravitation existe à distance, car l’intensité de la pesanteur n’est constante ni en grandeur, ni en direction. En supprimant le champ en un point, on l’accentue ailleurs : par exemple, relativement à l’observateur qui tombe en chute libre sur la Terre, le champ de la pesanteur est doublé dans la région symétrique par rapport au centre de la Terre.

Aucun champ de gravitation produit par la matière n’est uniforme ; aucun système de référence ne peut annuler un champ de gravitation dans toute son étendue : on ne peut supprimer un champ que localement.

L’Univers réel, envisagé dans son ensemble, n’est donc pas euclidien.

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  1. Il y a cependant une grosse différence déjà signalée, mais sur laquelle il convient d’insister. Dans l’espace tridimensionnel euclidien, le carré de la distance de deux points peut être mis, par un choix convenable des coordonnées (axes rectangulaires), sous la forme d’une somme de trois carrés :

    Dans l’espace-temps de Minkowski, les carrés qui interviennent dans l’expression du carré de l’intervalle entre deux événements ne sont pas tous affectés du même signe (à moins d’introduire une coordonnée temps imaginaire).

    Comme dit Eddington, le fait que le temps n’intervient pas avec le même signe que les distances « est le secret des différences que présentent les manifestations du temps et de l’espace dans la nature ».

    La géométrie de Minkowski (no 27) est hyperbolique. Néanmoins, malgré cette modification de la géométrie euclidienne, nous dirons qu’un espace-temps caractérisé par l’expression précédente de l’invariant est un Univers euclidien.

  2. P. Langevin, Journal de Physique, Conférence à la Société de Physique, mars 1913. — A. Einstein, Ann. de Phys., t. 49, 1916.
  3. Ce premier raisonnement d’Einstein était hybride : il associait le point de vue de la propagation de la lumière, régie par les lois de l’électromagnétisme qui impliquent des actions de proche en proche à travers l’espace, avec le point de vue de la mécanique classique, celui des actions instantanées à distance.
  4. Ce terme signifie que si ces lois sont données dans un système, elles sont données à la fois dans tous les systèmes.
  5. A.-S. Eddington, Space, Time and Gravitation. Traduction française par Jacques Rossignol, p. 109 (1921).
  6. A. Einstein, La théorie de la relativité restreinte et généralisée mise à la portée de tout le monde. Traduction par Mlle Rouvière, p. 54 et suivantes.