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Les Actes des Apôtres/48

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XLVIII

LE TRIBUN ROMAIN ASSEMBLE LE SANHÉDRIN POUR JUGER SAINT PAUL.



Grand’mère. Le lendemain, le tribun, qui avait fait enlever les chaînes de Paul, assembla le Sanhédrin, ou grand Conseil des Juifs ; il leur amena saint Paul et le plaça au milieu d’eux.

Paul, regardant d’un œil ferme et assuré les hommes du Sanhédrin, leur dit :

« Mes frères, jusqu’à ce jour, je me suis conduit devant Dieu comme un homme qui a une bonne conscience et qui veut agir avec justice. »

Au même instant, le Grand-Prêtre Ananie commanda à ceux qui étaient près de lui de frapper Paul sur la bouche. Alors Paul lui dit :

« Dieu te frappera lui-même, sépulcre blanchi. Quoi ! Tu es assis pour me juger, et, contre la loi, tu commandes qu’on me frappe ! »

Ceux qui étaient présents lui dirent : « Oses-tu bien maudire le Grand-Prêtre de Dieu ? » Saint Paul répondit : « Je ne savais pas, mes frères, que ce fût le Grand-Prêtre. Car il est écrit : Vous ne maudirez pas le Prince de votre peuple. »

Jacques. Je suis bien fâché que saint Paul réponde si doucement ; j’étais enchanté de ce qu’il avait dit à ce méchant Grand-Prêtre.

Grand’mère. Saint Paul a voulu témoigner par sa réponse douce et humble, de son respect pour les autorités instituées par Dieu lui-même ; et de celui que nous devons avoir pour les prêtres et tous les ministres du bon Dieu.

Élisabeth. Grand’mère, est-ce que saint Paul n’a pas un peu menti, en disant qu’il ne savait pas que ce méchant homme fût le Prince des prêtres ? Puisqu’il avait le Saint-Esprit et qu’il faisait même des miracles, il devait savoir à qui il parlait.

Grand’mère. Saint Paul n’a jamais menti, chère petite. Quoiqu’il eût le Saint-Esprit, il ne savait que ce que le Saint-Esprit lui permettait de savoir. Le bon Dieu aura permis ce moment d’ignorance, pour que saint Paul put exhaler librement son mécontentement contre ce juge injuste et oppresseur, et aussi pour faire rentrer en eux-mêmes le Grand-Prêtre et ceux qui jugeaient avec lui. Enfin, saint Paul, ne connaissant pas Ananie, pouvait s’y tromper, parce que le Sanhédrin s’était réuni non pas dans le Temple, comme d’habitude, mais dans l’appartement particulier du tribun, et aucun d’eux n’avait les ornements qu’ils portaient dans le Temple et qui faisaient reconnaître leurs différentes dignités.

Saint Paul savait qu’il y avait dans le Sanhédrin des Pharisiens et des Saducéens. Il dit donc aussitôt exprès pour les désunir :

« Mes frères, je suis Pharisien et fils de Pharisien ; et c’est parce que je crois comme les Pharisiens, à la résurrection des morts et à une autre vie, qu’on veut me condamner. » À peine eut-il prononcé ces paroles, qu’il s’éleva une grande discussion dans l’assemblée, entre les Pharisiens et les Saducéens.

Armand. Pourquoi cela ?

Grand’mère. Parce que les Pharisiens croyaient à la résurrection des corps, et les Saducéens n’y croyaient pas, et que tous étaient très-acharnés à soutenir leur opinion.

Il se fit donc un grand tumulte ; tous se disputaient et criaient. Les Pharisiens, voyant que saint Paul était de leur parti, disaient : « Nous ne voyons pas de mal en cet homme, il faut le laisser aller. » Les Saducéens criaient au contraire qu’il fallait le tuer pour l’empêcher d’enseigner une doctrine fausse et mauvaise.

Le tribun, craignant qu’ils ne missent saint Paul en pièces, fit entrer des soldats pour l’enlever et le conduire dans la forteresse. La nuit suivante, Notre-Seigneur apparut à saint Paul, et lui dit :

« Aie bon courage, Paul ! Tu m’as rendu témoignage à Jérusalem, ainsi faut-il que tu me rendes témoignage à Rome. »