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Les Diatomées

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LES DIATOMÉES


Les botanistes connaissent peu ce nom, tandis que les micrographes regardent les Diatomées comme une étude spéciale très-attrayante, à cause de leurs caractères géométriques si parfaits et de la faculté qu’elles possèdent, de supporter les plus forts grossissements du microscope. Ces petits corps si réguliers doivent leur nom à deux mots grecs : διά, à travers, τέμνω, je coupe, qui indiquent combien les nombreuses stries de leur surface impliquent une idée de division. Ces curieux végétaux sont classés parmi les algues, sur le dernier échelon de la grande famille des plantes aquatiques ; dépourvus de racines, de tiges, ils sont obligés de chercher leur appui dans les buissons de conferves aussi ténus qu’eux-mêmes ; la nature les a doués d’une propriété particulière qui fait qu’ils adhérent aux corps immergés, au moyen d’une membrane très-fine et cependant très-résistante, qui les préserve des causes accidentelles du déplacement de l’eau.

Héliogravure AURAND.
Les Diatomées.

Ce qui en fait le mérite aux yeux des investigateurs du monde des infiniment petits réside surtout dans la perfection de leur structure et la précision de leurs détails. En général, les Diatomées d’eau salée, telles que celles que l’on rencontre dans l’eau mère des marais salants, sont beaucoup plus belles que celles d’eau douce ; elles fournissent des tests ou sujets d’épreuve remarquables par leur disposition méthodique. Dans ces milliers de cellules, il ne s’est pas glissé la moindre irrégularité ; elles sont toutes disposées avec autant d’exactitude qu’aurait pu le faire le dessinateur le plus scrupuleux. Parmi les vingt ou trente mille cellules, larges à peine d’un centième de millimètre, sur un sujet invisible l’œil nu, qu’on pourrait tout au plus représenter sur le papier par une piqûre d’aiguille, il n’y a pas une seule irrégularité.

Notre figure montre des Diatomées Discoïdes, obtenues directement par la photomicrographie, puis ensuite reportées sur le cuivre au moyen de l’héliogravure, pour former un cliché typographique.

Quels que soient la difficulté d’exécution matérielle et le résultat relativement insuffisant de ce moyen de production, il n’est pas moins incontestable que certaines Diatomées ont conservé leurs traits généraux, tandis que d’autres dont la surface est moins en harmonie avec les ressources de l’optique, ont subi une légère déformation.

On trouve dans certains sujets une leçon complète de géométrie descriptive ; les cellules hexagonales, semblables à celles des gâteaux de cire des abeilles, sont disposées méthodiquement et juxtaposées avec une symétrie telle que toutes les cellules se raccordent exactement entre elles. En examinant même bien attentivement une photographie amplifiée à 800 ou 1 000 diamètres des Cosinodiscus ou même des Triceratium, on y trouve la solution d’un problème géométrique fort embarrassant même pour ceux qui sont familiarisés avec les difficultés du tracé. Afin d’obvier à la différence inévitablement produite sur une surface convexe, entre la position des cellules centrales et celles de la périphérie devant toutes conserver leur position normale, il existe un réseau compensateur formé de cellules pentagonales ou même irrégulières ; ces intermédiaires de raccordement, seulement appréciables sur la photographie, sont si bien combinés, qu’ils échappent à l’observation microscopique ordinaire.

Comme les objectifs microscopiques ne peuvent donner qu’un seul et même plan, il est impossible de mettre au foyer toutes les parties d’un grand nombre de Diatomées, dont la surface comporte plusieurs plans. Le manque de netteté produit ainsi des pseudo-dégradations aux effets fantaisistes ; ainsi pour l’Aulacodiscus, on voit huit ondulations symétriquement placées suivant deux axes croisés, qui donnent l’idée d’un rond de carton perforé, qu’on aurait fait gauchir à l’humidité. En mettant au point le plan supérieur, on obtient une croix, tandis que la figure est renversée si l’on abaisse le plan d’observation

Plus on poursuit profondément les études de micrographie supérieure sur ces étonnants représentants du monde des infiniment petits, plus on y découvre de sujets d’admiration pour les œuvres infinies de la nature.

J. Girard.