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Météorite de Bendégo — Rapport/03

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II

Reconnaissance géologique du terrain où est tombé le météorite de Bendégo


Aspect général de la zone parcourue

La seule roche trouvée dans le terrain où est tombé le météorite de Bendégo est de gneiss, en grande partie décomposé.

Quelques blocs de granit amoncelés sur des roches rases et déjà décomposées garnissent les rives du ruisseau Bendégo, d’autres files en petites collines suivent la direction de la Serra do Athanasio, qui va du Nord au Sud et se soulève à neuf kilométres de ce ruisseau.

Des blocs isolés de gneiss et de granit, répandus les uns à la surface du sol, d’autres plus ou moins profondément enterrés dans le sol, ayant tous des formes arrondies et des dispositions capricieuses, sont le caractère particulier de cette étrange zone du sertão.

Dans ces parages, comme bien au-delà du Bendégo, on rencontre de grands affleurements de roches en décomposition, où se trouvent de profondes dépressions ou fosses, naturelles ou creusées de main d’homme, à l’aide du feu, dans le but d’y recueillir l’eau des pluies.

Ces fosses, appelées étangs de pierre sont généralement couvertes d’une grille en bois, entourées de murs en pierre sèche, et entretenues avec soin par leur propriétaire, qui les regarde comme un patrimoine de la famille et la plus importante amélioration de sa propriété.

Le sol est partout maigre, pauvre et sablonneux. La terre n’est arrosée que par les pluies torrentielles des orages, qui transforment d’insignifiants ruisselets, dans le lit desquels on passe à pied sec presque toute l’année, en torrents impétueux formés par des crues rapides et dangereuses, qui s’élèvent de six à sept mètres au dessus du lit ordinaire, généralement couvert de cailloux roulés de quartz, de silex et d’un grès des plus durs.

La végétation est rare et chétive ; ce n’est qu’au fond des vallées près des petits cours d’eau, que l’on rencontre quelques grands arbres isolés ou en petits groupes.

Une végétation arborescente peu développée, croissant du milieu de hauts plateaux couverts de sauvages catingaes[1], où prédominent les familles des Cactées, Apocynées, Asclépiadées, Euphorbiées, Sapotacées, Anacardiacées, Légumineuses, Urticées, Smilacées, Bromêliées, Loranthacées, Molvacées, Bombacées, Palmiers, Polypodiées, est le principal trait caractéristique du sertão[2] de la province de Bahia, dans lequel nous marchons.

Le sol des Catingas varie ; il est tantôt calcaire, sablonneux, ou argileux, ou dioritique, ou enfin granito-quartzeux.

Les espèces particulières à la flore des Catingas et que l’on rencontre le plus constamment sont[3] :

Divers Mandacarus (Cactus) Cereus scopa (D. C.).
Cereus mandacaru (Caminh.).
Cereus hexagonus (L. W.).
Cereus Jamacaru (S. Dyck).
Cereus geometrizans (Mart.).
Cereus flagelliformis.

Ces deux derniers sont aussi connus sous les noms vulgaires de facheiro ou mandacaru de bol.

Le mandacaru de leite est une Euphorbiacée (Euphorbia phosphorea).

Diverses Palmatorias (Raquettes) Opuntia brasilienses (How.). Opuntia electa (Otte).

Il y a plus d’une Cactacée de ce nom dans les sertões et dans les catingas de la province de Bahia : les plus communes sont celles qui viennent d’être indiquées.

Cabeça de frade Diverses espèces de Melocactus (Meloc. Hookerianus (Gardn.)) et d’Echinocactus sont connues sous ce nom.
Cansansão ou cansansão de leite Jatropha urens ou Jatropha vitifolia.
Macambira Bromelia lacintosa (Arr. Cam.).
Icó Capparis Ico (Eichl.) ou Colicodendron — Ico (Mart.).
Umburana ou Imburana Bursera leptophlœos (Mart.) ou Icica leptophlœos (Mart.).
Alecrim (arbre) Hypericum laxiusculum (Saint Hilaire).
Candeia ou páo de candeia Piptocarpha rotundifolia (Baker).
Umbuzeiro ou imbuzeiro Spondias purpurea (L.) ou Spondias tuberosa (Arr. Cam.).
Imbauba das caatingas. Cecropia carbonaria (Mart.)
Gravata Bilbergia patentissima (?)
Barba de páo Tillandsia recurvata (L.) ou T. usneoides (L.)
Catingueira Linharea tinctoria (Arr. Cam.).
Caranai ou palmeira espinhosa Mauritia aculeata (Mart.)
Aricuri ou nicuri Cocos coronata (Mart.).
Assahi das Caatingas Euterpe catinga (Wall.) ou Euterpe molissima (B. Rod.) e var. Aurantiaca.
Barriguda Chorisia ventricosa (St. Hil.) e Chorisia crispiflora (H. B. Kth.)
Cajueiro anão ou do campo, Embirussu da catinga Anacardium humile (St. Hil.), Bombax Martianum (Schum.) ou Carolinea tomentosa (Mart.)

Il y a encore en abondance : Favella, Chique chique, Catinga de porco ou Páo de rato et Carahybeira, dont nous n’avons pu trouver la classification.

La Barauna — Melanoxylon brauna ; l’Aroeira — Astronium sp. ; l’Itapicuru — Peltogine sp. ; l’Ipé — Tecoma speciosa ; la Caraiperana — Moquilea turiuva ; le Genipapo — Genipa Brasiliensis ; le Caixão — Curataris Estrellensis ; la Juréma — Acacia Jurema ; le Jatoba — Hymnea courbaril ; le Joazeiro — Ziziphus Joazeiro ; et l’Angico — Acacia Angico sont les genres les plus communs de la végétation des vallées.

À 20 kilomètres de Bendégo, on trouve des os fossiles épars à la surface du terrain ou peu enterrés dans le sol.

Nous avons vu, à l’endroit appelé Quebreguenhem, des ossements d’animaux de dimensions colossales.

Le musée national en possède déjà plusieurs exemplaires, les uns incomplets, les autres en fort mauvais état.

Ces os appartiennent pour la plupart aux genres Megatherium et Mastodonte.

Il est presque certain qu’il existe d’importants dépôts de squelettes d’animaux gigantesques dans des lagunes bien voisines de celle que nous avons visitée.

Le temps nous manquait pour nous distraire de l’objet principal de notre mission, et les connaissances nécessaires nous faisaient défaut pour aller au-delà de ce que nous devions faire ; c’est ce qui, malheureusement, rend fort incomplets ces renseignements, qui auraient pu être très intéressants et profitables, s’ils eussent été fournis par quelque savant paléontologiste.

La Serra Geral, après avoir livré passage au fleuve São Francisco, entre sur le territoire de la province de Bahia dans la direction Nord-Sud ; elle y lance de tous côtés des ramifications, forme un système avec d’autres chaînes secondaires, et constitue ainsi le squelette rocheux de la province, y détermine la formation spéciale des différentes vallées et les contours capricieux du réseau hydrographique.

Parmi les principales ramifications de Serra Geral, dans la zone de notre parcours, s’élèvent les chaînes qui ont les directions suivantes :

Serra do Sobrado NO
do Itiù NO
do Lopes 10° NE
do Acarù 10° NO
do Athanasio 20° NO
do Monte Santo 11° NO
Grande 30° NO
Branca 20° NO
do Itiuba NS

Les chaînes du Sobrado et de l’Acarù forment la ligne de partage des eaux de l’Irapiranga (Poisson rouge, en langue indigène), vulgairement connu sous le nom de Vasa Barris, et de l’Itapicuru-Assu.

L’Irapiranga naît dans la chaîne de l’Itiù et se rend dans l’Océan, après avoir traversé la province de Sergipe dans la direction SE ; l’Itapicuru-Assu a sa source dans les montagnes de la Jacobina Velha, traverse la province de Bahia de l’Ouest à l’Est et porte à la côte de l’Océan les eaux de ses plus importants tributaires de cette partie du sertão, le Jacuricy, l’Itapicuru-mirim, le Cariaca, le Riachão, le Rio do Peixe et autres.

La rivière Jacuricy, affluent principal de l’Itapicuru-Assu, naît dans la lagune Sucuriuba, qui est entre les chaines du Lopes et de l’Itiuba.

L’Itapicuru-mirim vient des versants de la chaîne de la Saude, au-delà du bourg Villa Nova da Rainha, aujourd’hui ville de Bom Fim.

Le Rio do Peixe naît dans la Serra de la Caracuenha, et le Carioca dans celle du Lopes.

L’Itapicuru-Assu reçoit la rivière Jacuricy immédiatement au-dessous du bourg de Santo Antonio de Queimadas, et le Rio do Peixe après sa jonction avec le Riachão, à peu de distance de la station du Rio do Peixe.

L’Itapicuru-Assu et l’Itapicuru-mirim, ainsi que le Rio do Peixe et le Riachão, coupent le prolongement du chemin de fer de Bahia au São Francisco, qui les traverse, ceux-là sur des ponts de 50m. d’ouverture ; le Riachão sur un de 30m. et les deux bras du Rio do Peixe, sur deux ponts de 30 et de 16m. d’ouverture.

L’Itapicuru-Assu traverse le prolongement du chemin de fer à 227km.603 ; l’Itapicuru-mirim à 280km.612 ; le Rio do Peixe à 206km.600 et le Riachão à 200 km.

Des Serrotes das Pedras miúdas et de l'Arraial naît le ruisseau Desterro, principal affluent du Bendégo, qui prend sa source dans une lagune située vers la base orientale de la Serra do Athanasio, et après avoir parcouru une vallée reserrée et tortueuse va s’unir au fleuve Vaso Barris au village de Canudos, à 45 km de sa source.

Dans presque tout son parcours, le Bendégo est coupé de fortes murailles en pierre sèche, élevées par les riverains, dans le but de retenir les eaux pendant la saison des pluies et de se prémunir par ce moyen contre les calamités de la sécheresse.

La chaîne ou Serra do Lopes suit parallèlement à la Serra Geral ; la chaine de Monte Santo, toute de quartzite, et la Serra Grande, formée en grande partie de schistes en état de décomposition avancée, d’où se détachent des feuillets de 0m, 01 à 0m, 02 d’épaisseur et d’une surface restreinte, s’étendent dans la direction même de la Serra Grande.

Les Serras do Garrote, Caixão, Manoel Alves, Damasio et Engorda, qui s’inclinent sur celles-ci ; enfin, les Serras Branca et du Jabucunam, Santa Rosa, Capivara, Pedra d’Agua et São Sebastião, qui courent vers l’Ouest de la Serra de Monte Santo, et la Serra d’Itiuba, oú prédominent le granit, le gneiss, les diorites et les syénites, forment la ligne d’horizon d’une grande zone formée de vallées profondes et longues, à travers lesquelles, à l’époque des orages, les grosses pluies des averses creusent d’immenses sillons, qui portent les eaux à l’Itapicuru-Assu, seul fleuve de courant constant dans toute cette considérable partie du sertão de la province de Bahia.

Le manque de pluies régulières donne à la zone que nous parcourons un aspect désolé, et la végétation des graminées et de petits arbustes, dont est couverte pendant l’hiver la couche de sable plus ou moins épaisse qui s’étend sur les hauts plateaux, disparaît complètement durant la période brûlante de l’été.

Quelques lagunes fournissent de l’eau de mauvaise qualité, et à peine pour la consommation du bétail.

Dans la partie du sertão qui est au-delà de la Serra Grande et où l’hiver ne se fait pas sentir, les éleveurs se voient dans la dure nécessité de mettre les bestiaux à la ration de l’eau, jusqu’à ce que, par les pluies des orages, les étangs et les mares s’emplissent et améliorent leur situation jusqu’à l’année suivante.

La misère est grande, quand les pluies des orages viennent à manquer pendant deux ou plusieurs années ; cependant, dès que les arrosages naturels se produisent au temps voulu et en quantité suffisante, il y a abondance de produits alimentaires excellents et variés.

Les seules cultures qui puissent résister à ces irrégularités d’arrosage et même à des sécheresses prolongées, sont celles du coton et du tabac, qui, heureusement, se développent sur une grande échelle, grâce à l’accroissement des facilitées de transport, par les voies récemment ouvertes vers les centres de consommation.

Le thermomètre centigrade marque fréquemment 35° à l’ombre.

Les nuits sont fraîches.

Le sertão de la province de Bahia que nous parcourons ne se prête pas à la description, on ne le comprend qu’en le voyant. Nous adoptons comme nôtres les paroles de M. le professeur J. M. Caminhoá, et nous transcrivons ses observations sur le sertão, car nous n’avons pas la prétention de dire mieux.

M. le professeur J. M. Caminhoá dit :

« Il y a une erreur dons laquelle sont tombés beaucoup de savants et de naturalistes qui ne sont point venus au Brésil et ont été mal informés, et d’autres qui y sont venus, mais n’ont visité les sertões qu’au temps de la sécheresse ; cette erreur est de regarder ces parages comme des déserts arides, sans végétation et inhabitables.

« Selon l’époque à laquelle on le parcourt, il offre des tableaux d’une nature si différente, si opposée même, que bien des fois le naturaliste ou le voyageur a de la peine à croire que l’endroit où il se trouve soit le même qu’il a visité quelques jours ou quelques semaines auparavant !

« Au temps de la Saison des eaux, ce qui revient à dire de la vie, la végétation est puissante et originale, le ciel clair et la nature enchanteresse ; au temps de la sécheresse, les champs se montrent noirs ou gris, par la teinte de l’herbe torréfiée ; quand le sol n’est pas sablonneux, il se fend profondément ; les arbres sont dépouillés de feuilles, les branches et les rameaux qui meurent sont tellement desséchés, que, chez quelques espèces, le frottement de l’un à l’autre suffit pour produire du feu, et, si l’on n’y prête pas une attention suffisante, un terrible incendie s’allume au sein des arbustes et des arbuscules tortueux, incendie presque inextinguible, parce qu’alors on ne trouve que de faibles quantités d’eau et en peu d’endroits ; outre cela, il y a grand danger pour le bétail.

« Quand arrive la saison chaude et sèche, la verdure du feuillage disparait du sertão, excepté celle des Joazeiros (Zisyphus Joazeiro), jujubiers, et de quelques autres végétaux, et le paysage prend l’aspect de l’hiver rigoureux dans les climats froids ou tempérés ; mais il s’en distingue ici surtout par des bois de cactus gigantesques (mandacarus, palmatarias, etc.) et d’autres épineux, rappelant, jusqu’à un certain point, les Euphorbiacées cactoïdes qui caractérisent la végétation aux abords des déserts africains ; surtout au coucher du soleil, alors que l’horizon du sertão est aussi rouge que là, l’irradiation du calorique est extraordinaire et, jusqu’à une certaine hauteur, l’atmosphère contient une épaisse couche de poussière.

« Outre les cactus et les jujubiers, il n’y a que très peu d’autres plantes qui restent vertes pendant la Saison sèche dans les sertões, nous pouvons citer entre autres l’umbuseiro, dont nous parlerons plus loin, plante très utile, dont les feuilles, comme celles du jujubier, sert à alimenter les agneaux et le petit bétail en plusieurs endroits.

« La nuit, quand le ciel est pur et très beau, et que la lumière stellaire se répand à travers l’atmosphere, on jouit d’un spectacle original, digne de n’être pas oublié.

« On entend au loin et de plusieurs côtés, un chant triste et monotone, auquel succède un bruit accompagné de nuages de poussière, soulevés par le bétail altéré et affamé, qui court vers l’endroit où les vachers, armés de torches allumées, faites d’un Cereus qu’ils appellent facheiro, brûlent les épines des mandacarus (Cereus Jamacaru et autres) des palmatorias (Opuntia) et de beaucoup d’autres cactées, pour que les animaux puissent, au moins pendant la nuit et les jours suivants, avoir de quoi manger, et se desaltérer avec l’abondant liquide acidulé et agréable contenu dans les cladiodes de ces plantes providencielles pour de telles régions !

« Outre leur rôle de grenier et de source pour le bétail, durant la sécheresse, il est des cactus qui accumulent dans leurs racines une grande provision de fécule ; ces racines rôties, puis râpées et réduites en farine, servent de nourriture à l’homme.

« En certaines occasions, il monte du fond des vallées un bruit spécial produit par les pelles avec lesquelles les vachers creusent le lit des rivières taries, pour trouver un peu d’eau, quelquefois à un mètre et plus de profondeur ; ils appellent cela faire des cacimbas ou des puits ; c’est avec cette eau, saturée de sels, qu’ils mitigent la soif du bétail.

« Les cacimbas sont souvent creusées dans le lit de rivières navigables en d’autres temps par des embarcations d’un tonnage régulier !

« À cette époque, les bêtes féroces altérées abandonnent leurs antres, et viennent jusqu’auprès des habitations attaquer les bestiaux. Le gros gibier (veados ou chevreuils, caititus, etc.) est facilement tué près des vallées où il y a des cacimbas, et dans le voisinage des habitations ; les pigeons sauvages, les perdrix et des centaines d’autres oiseaux sont pris presque à la main !

« Saint-Hilaire a écrit ce qui suit, au sujet du sertão en temps de sécheresse :

« Alors une chaleur irritante abat le voyageur ; une poussière incommode se lève sous ses pas, et quelquefois même il ne trouve pas d’eau pour se désaltérer. On a toute la tristesse de nos hivers sous un ciel brillant et avec les chaleurs de l’été »

« Cet état de choses dure d’un mois et demi à deux mois, et même trois, quand il n’y a pas d’irrégularité dans les saisons.

« À la fin de cette phase, il vient un jour où l’atmosphère est brumeuse, le ciel se noircit et une terrible tourmente se prépare ! C’est l’approche des premières eaux.

« Chose curieuse ! Pendant que cela se produit, et aussitôt que brillent les premiers, rapides et longs éclairs, suivis du fracas du tonnerre, le bétail saute sur les pentes et sur les collines, semblant éprouver du plaisir et paraissant prévoir les avantages qui vont provenir de ce changement de temps !

« La pluie qui tombe alors est torrentielle, mais les champs et les routes, profondément fendus, l’absorbent tout d’abord en entier. Il s’en exhale alors cette odeur d’argile cuite, si excitante pour les géophages.

« Au bout de peu d’heures quelquefois, et tout au plus au bout de quelques jours, la température baisse d’une manière telle que l’on se croirait sous un climat bien différent, surtout si après l’orage la pluie continue incessante et fine ; la végétation renaît dans les campos, dans les catingas et dans les cerrados’, avec une telle vigueur que les bourgeons se développent en un petit nombre d’heures.

« Le sol, qui était noirâtre, se couvre en peu de jours d’un tapis d’émeraude et les champs nuancés abondent surtout en flores de vaqueiro (Sida, Malvacée), cecem et d’autres Amaryllis, malmequeres, soucis, etc.

« Dans l’espace d’une semaine ou deux, outre l’herbe, la florescence commence dans les bois, et les vallons, où des plantes grimpantes forment des festons et des guirlandes ou s’enroulent au tronc des arbres et se couvrent comme eux de grandes et belles fleurs aromatiques.

« L’umbuseiro (Spondias tuberosa) fleurit aussitôt et se couvre peu après de savoureux fruits aigre-doux et odorants, dont la pulpe, mêlée à du lait, fournit une boisson délicieuse, l’umbusada, que l’on prend seule ou mêlée à de la coalhada escorrida (lait caillé égoutté).

« Le pão d’arco (Tecoma), soit violet, soit jaune, est, au lieu de feuilles, couvert de très jolies fleurs délicates qui donnent aux forêts un admirable aspect de fête ! Les mulungus ou morungus (Erythrina) des haies natives des malhadas et des curraes, n’ont pas même une feuille encore et sont déjà couverts de fleurs d’un rouge écarlate vif et brillant.

« L’air que l’on respire alors a un arôme des plus agréables et des plus exquis !

« Quand la pluie continue pendant plusieurs jours, les ruisseaux s’emplissent ainsi que diverses rivières.

« Une température de 16° à 18° centigrades la nuit et le matin oblige ceux qui, peu de jours auparavant, dormaient en plein air et avec trop de chaleur, à chercher un abri.

« Les oiseaux, qui avaient émigré vers les rives et le voisinage des cours d’eau et des sources, reviennent à leur demeure accoutumée.

« C’est là que nous avons compris combien a été bien applique le nom de festicus donné aux perroquets ! En effet, quand ces oiseaux arrivent en criant gaiement, accompagnés des arapongas, des chéchéos et d’une multitude d’autres, ces parages commencent à s’animer et toute la nature semble s’éveiller ! Alors le sertanejo (homme du sertão) est heureux et n’envie pas même les rois de la terre.

« Bientôt commencent les vaquejadas, c’est-à-dire, la réunion du bétail sauvage, qui doit être marqué par le fer au signe distinctif de la propriété à laquelle il appartient.

« Vêtu de son gibão (pourpoint), de ses perneiras (guêtres), de son guarda peito (plastron) et de son chapeau, le tout en cuir tanné, le vaqueiro chevauche sur un habile et rapide animal, et porte pendant à sa ceinture la faca-de-arrasto (coutelas), qui lui sert à couper le cipoal (réunion de lianes), ou quelque branche épineuse qui lui embarrasse le passage, et au côté le laço, sorte de fronde qu’il mianie habilement pour enlacer le bétail qu’il poursuit d’une course vertigineuse à travers champs, ou plus interrompue dans la catinga et la forêt.

« Les agriculteurs sertanejos savent profiter de l’époque opportune pour planter les légumes et les verdures, le maïs et d’autres végétaux qui mûrissent en peu de temps, ce qu’ils font aussitôt après les pluies ou les primeiras aguas qui suivent les premiers orages ; ces pluies, qui déterminent l’apparition des feuilles des arbres, s’appellent aussi de rama.

« Passé ce temps, quand reviennent les chaleurs, et à mesure que les eaux baissent dans les rivières et les ruisseaux, ils sèment et plantent le tabac, le manioc, le manioc doux (aipim), les pastèques, les citrouilles, des légumes, le maïs et même le riz, sur les bords des rivières, des lagunes et des étangs, etc., où l’humidité se conserve assez abondante pour donner la récolte.

« Cette plantation, dans la province du Ceará et dans quelques autres provinces du Nord, prend le nom da vasante, c’est-à-dire de la baisse des eaux.

« Il y a deux époques de sécheresse, qui sont désignées là par les noms d’Été d’Octobre et Été de Mars.

« Il y a aussi deux époques d’abondance dans ces parages pendant l’année, quand les saisons suivent leur cours régulier : le commencement de chacun des étés, époque où l’on récolte les produits du premier, qui murissent durant le second et vice versa. »

Tableau des altitudes approximatives des points culminants de diverses chaînes de montagnes comprises dans la zone explorée
DÉSIGNATIONS Altitude en mètres
Hauteur de la Santa Cruz dans la Serra de Monte Santo 781
Jabucunam Serra du Lopes 630
Carahyba 680
Pedra d’Agua 720
Santa Rosa 800
Morne d’Engords 620
Lage 620
Serra Queimada 680
Sera Grande 630
Sera d’Athanasio 630

  1. Le professeur J. M. Caminhoá, dans son traité de Botanica Medica Geral, fascicule xiii, dans la partie qui s’occupa de la Géographie Botanique, dit :

    « Caá-tingas ou Catios. — Ce mot est aussi d’origine tupy ; il vient de caâ, plante ou bois et tinga, épineux ( puant ?).

    On appelle ainsi certaines forêts intertropicales peu épaisses et peu élevées, d’arbres tortueux, et d’arbustes souvent épineux ou acuminés, qui perdent leurs feuilles en été ; ce qui les distingue est leur peu de rejetons : l’écorce est épaisse et encroûtée de Lichens, etc. »

  2. SERTÃO, SERTÕES. — On appelle ainsi des zones de l’intérieur du pays, plus ou moins étendues, sèches et élevées, d’ordinaire peu convenables à la production d’un grand nombre de végétaux et caractérisées par une flore spéciale.

    Le mot sertão sert aussi parfois pour designer des endroits plus ou moins éloignés, lors même qu’ils sont couverts de forêts ; c’est dans ce sens qu’il est employé sur plusieurs points de la province d’Espirito Santo (Geographia botanica, du professeur J. M. Caminhoã.)

  3. Classification du professeur J. M. Caminhoá — Geographia botanica.