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Nul aviron sous terre et nul fleuve à franchir
Pour comprendre l’espace et marquer la présence

Vivre n’est que d’aller d’un corps à son néant
De la forme à la nuit et du sens à l’oubli

Vivre c’est tout manquer et manquer à soi-même
Puisque je meurs dans ce que j’aime à tout instant

Je ne me suis jamais tué mais on me tue
Je laisse l’illusion aux pleutres aux profanes

Et la démence est faite fée par le chagrin
L’aveugle a vu sa chair décroître

Ruines vous êtes entières
Dans le champ de ma vision
Comme à plaisir décharnée
Comme à douleur annulée.

Au bien :

De sa bouche bâillonnée
L’heure embrasse le silence

Une abeille roule au sol
Avec mille de ses sœurs