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Page:Œuvres de C. Tillier - III.djvu/51

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SUR LA RÉFORME ÉLECTORALE.

homme se revèle-t-elle à votre ignorance ? C’est que la réputation est une enseigne que tout homme porte devant lui et qui l’indique au public. Ce que vous faites pour votre montre, pourquoi le peuple ne le ferait-il pas pour des représentants ? Dans cet arrondissement, il y a une grande illustration, comme dit M. le préfet, et beaucoup de capacités qui ne savent pas lire. Cependant, c’est toujours à la grande illustration que les capacités qui ne savent pas lire font donner leurs voix. Vous assez me dire que la réputation la plus éclatante est quelquefois usurpée, mais vous-même, n’êtes-vous pas, comme le serait le peuple, susceptibles de vous laisser tromper ? Que dis-je, susceptibles… ? vous vous laissez tromper à chaque élection. Le député que vous prenez pour un rigide citoyen, qui n’ira point flagornant les ministres et qui ne s’occupera que des intérêts de la France et non de ceux de la localité, se trouve presque toujours un misérable apostilleur de pétition qui oublie la France pour ses électeurs, et par lequel l’arrondissement est inondé de fonctionnaires et bariolé de croix d’honneur.

Le peuple se laisserait corrompre, dites-vous ! Est-ce que vous avez peur qu’il gâte le métier ? Mais, vous qui parlez ainsi, croyez-vous que nous ayons les yeux fermés sur votre urne, que toute cette corruption, qui est au fond, ne jette point d’odeur ? qu’avons-nous vu aux dernières élections ? une sale et dégoûtante friperie de consciences étalée et marchandée publiquement, le gouvernement se faisant agent de corruption, achetant par des promesses ou intimidant par des menaces, et la nation recevant par tous les pores les miasmes empoisonnés qui s’exhalent de la matière électorale en putréfaction.

Le peuple se laisserait corrompre ! vous vous croyez bien plus moral que lui, système. Mais la richesse a, proportion gardée, autant que la pauvreté, de mauvais sujets qui la déshonorent. Du côté de la pauvreté, c’est le vol franc, tout nu, bien caractérisé, tel que le définit le code ; c’est à ses risques et périls qu’on est mal-