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Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 12, 1838.djvu/56

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brigandage exercé sur mes terres. » En moins de trois minutes un des valets vint lui apprendre qu’Aymer, prieur de Jorvaulx, et le vaillant chevalier Brian de Bois-Guilbert, commandeur de l’ordre vénérable des Templiers, avec une suite peu nombreuse, demandaient l’hospitalité pour une nuit, se rendant au tournoi qui devait avoir lieu le surlendemain, près d’Ashby-de-la-Zouche.

« Le prieur Aymer ! Brian de Bois-Guilbert ! murmura Cedric, Normands tous deux ! mais, Normands ou Saxons, l’hospitalité de Rotherwood ne leur sera point refusée ; du moment qu’ils l’ont choisi pour halte, qu’ils soient les bienvenus, quoiqu’ils eussent mieux fait encore de poursuivre leur route. Ce n’est pas qu’il ne fût indigne de se plaindre pour avoir à les loger et à les nourrir pendant une nuit ; en leur qualité d’hôtes, même des Normands sauront sans doute retenir leur insolence. Va, Hundbert, dit-il à une espèce de majordome qui se tenait derrière lui une verge blanche à la main ; prends six hommes avec toi, et introduis les étrangers dans la salle des hôtes. Aie soin de leurs chevaux et de leurs mules, et veille à ce que leur suite ne manque de rien. Que tous aient d’autres vêtements s’ils le désirent, et du feu dans leur chambre, de l’eau pour se laver, et du vin et de l’ale ; dis à mes cuisiniers d’ajouter vite ce qu’ils pourront au souper, et qu’on le serve dès que ces étrangers seront disposés à le prendre. Dis-leur, Hundbert, que Cedric aurait été leur offrir lui-même ses complimens s’il n’avait juré de ne jamais avancer de plus de trois pas au delà de son dais pour aller à la rencontre de quiconque ne descend pas du sang royal saxon. Va, cours, veille à tout afin que ces étrangers soient forcés de convenir dans leur orgueil que le rustaud de Saxon ne leur a pas montré de pauvreté ni d’avarice. »

Le majordome partit avec plusieurs domestiques pour remplir les volontés de son maître. « Le prieur Aymer, répéta Cedric en regardant Oswald ; c’est, je crois, le frère de Giles de Mauleverer, maintenant lord de Middleham. » Oswald fit un signe d’assentiment respectueux. « Son frère, ajouta le Saxon, occupe la place et usurpe le patrimoine d’une meilleure race, celle d’Ulfgar de Middleham ; mais quel seigneur normand n’agit pas de même ? Le prieur est, dit-on, un prêtre franc et jovial, qui aime une coupe de vin et le bruit du cor de chasse mieux que la cloche et le bréviaire : allons, qu’il vienne ; il sera le bienvenu. Et le templier, comment l’appelez-vous ?

— Brian de Bois-Guilbert. »