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Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 14, 1838.djvu/251

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qui menacent aujourd’hui ma vie pour m’être laissée tomber dans les filets qu’ils m’avaient eux-mêmes tendus !

— Madame, dit Ruthven, nous savons que vous êtes orateur ; et c’est peut-être pour cette raison que le conseil a envoyé vers vous des hommes qui connaissent plus la guerre que le langage des écoles, ou les intrigues des cours. Nous désirons seulement savoir si, sous la garantie de la vie et de l’honneur, vous voulez abdiquer le gouvernement du royaume d’Écosse ?

— Et quelle garantie aurai-je, dit la reine, que vous garderez fidèlement le traité, si je consens à céder ma dignité royale pour obtenir la réclusion, et le droit de pleurer sans témoins ?

— Vous aurez notre honneur et notre parole, madame, répondit Ruthven.

— Ce sont des garanties bien faibles, bien peu solides, milord, dit la reine ; ne pourriez-vous y ajouter la moindre bagatelle, ne fût-ce qu’un duvet de chardon d’Écosse pour leur donner du poids dans la balance.

— Sortons, Ruthven, dit Lindesay : elle a toujours été sourde à tous les conseils, si ce n’est à ceux des flatteurs et des sycophantes ; qu’elle soit abandonnée à son refus, et qu’elle en subisse les suites.

— Arrêtez, milord ! s’écria sir Robert Melville ; ou plutôt permettez-moi d’avoir quelques minutes d’entretien particulier avec Sa Grâce. Si ma présence peut être utile à quelque chose, ce doit être comme médiateur ; ne quittez pas le château, je vous en conjure, ne rompez pas la conférence, avant que je vous annonce le parti que Sa Grâce aura résolu définitivement de prendre.

— Nous resterons au château une demi-heure, répondit Lindesay : mais en méprisant notre parole et la garantie de notre honneur, cette femme a outragé mon nom : qu’elle réfléchisse donc sur le parti qu’elle va prendre sans nous. Si la demi-heure se passe sans qu’elle se soit déterminée à acquiescer aux demandes de la nation, sa carrière sera courte. »

Les deux lords quittèrent l’appartement sans beaucoup de cérémonie, traversèrent le vestibule, et descendirent l’escalier tournant : le bruit de la grande épée de Lindesay retentissait sur chaque marche. George Douglas les suivit après avoir échangé avec Melville un geste de surprise et de sympathie.

Aussitôt qu’ils furent partis, la reine donnant cours à ses craintes, à son chagrin et à son agitation, se jeta sur son siège, se tordit