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Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 14, 1838.djvu/370

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espérons que bientôt votre tâche d’hospitalité sera terminée.

— Ces paroles me percent le cœur, dit la dame de Lochleven… Mon âme est brisée, et je prie Votre Grâce de me dire où est votre mal, afin qu’on puisse vous secourir à temps.

— Mon mal, reprit la reine, n’est rien… rien qui mérite qu’on en parle ou qu’on dérange un médecin : mes membres sont lourds, mon cœur est froid ; il est rare qu’un prisonnier soit autrement… Il me semble que l’air pur et la liberté me ranimeraient ; mais, puisque les États l’ont ordonné ainsi, la mort seule peut briser les portes de ma prison.

— S’il était possible, madame, dit lady Lochleven, que votre liberté pût vous rendre à une santé parfaite, j’encourrais moi-même le ressentiment du régent… de mon fils sir William, de tous mes amis, plutôt que de vous voir subir votre sort dans ce château.

— Hélas ! madame, » dit lady Fleming, qui conçut que le temps était propice pour prouver qu’on avait jugé trop légèrement de son adresse, « il ne faudrait qu’essayer ce que pourrait faire pour nous la liberté : quant à moi, il me semble qu’une promenade sur le vert gazon me ferait beaucoup de bien. » La dame de Lochleven se releva ; et jetant un regard pénétrant à la vieille valétudinaire : « Êtes-vous donc si malade, lady Fleming ?

— Très-malade, en vérité, madame, reprit la dame de cour, et surtout depuis déjeuner.

— Au secours ! au secours ! » s’écria Catherine pour rompre une conversation qui ne lui annonçait rien de bon pour ses projets. « Au secours ! vous dis-je, au secours ! la reine est prête à passer. Soutenez-la, lady Lochleven, si vous êtes encore une femme. »

La dame se hâta de soutenir la tête de la reine, qui, tournant vers elle des yeux languissants, s’écria : « Merci, ma très-chère dame de Lochleven… Malgré quelques dernières circonstances, je n’ai jamais douté de votre attachement pour la maison des Stuart ; vous l’avez prouvé, m’a-t-on dit, avant ma naissance. «

La dame de Lochleven se releva soudainement, car elle s’était encore agenouillée ; et après avoir marché dans la chambre à grands pas, elle ouvrit brusquement la fenêtre comme pour prendre l’air.

« Que Notre-Dame me pardonne ! se dit Catherine. Faut-il que l’amour du sarcasme soit implanté dans le cœur des femmes, puisque la reine, avec tout son sens, risque sa perte, plutôt que de re-