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Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 20, 1838.djvu/408

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pour nous ; et nous rentrâmes dans les noirs corridors par lesquels nous avions déjà passé. Dans une petite antichannbre mon oncle s’arrêta, et, m’enveloppant à la hâte d’un manteau qui s’y trouvait suspendu, nous passâmes devant les sentinelles ; — nous parcourûmes de nouveau le labyrinthe de rues et de ruelles désertes, et nous regagnâmes notre logement éloigné sans attirer le moins du monde l’attention.

— J’ai souvent ouï dire, interrompit Darsie, qu’une femme qu’on suppose un homme déguisé, — et pourtant, Lilias, vous n’avez pas l’air bien masculin, — avait ramassé le gantelet du champion lors du couronnement du roi actuel, et en avait laissé un autre en place, avec un papier contenant offre d’accepter le défi, pourvu qu’on observât les lois du champ clos. J’avais toujours regardé ce fait comme un conte, et je me doutais peu de toucher de si près aux acteurs d’une scène si audacieuse. — Comment avez-vous pu trouver assez de courage pour y jouer votre rôle ?

— Si j’avais eu le temps de réfléchir, répondit Lilias, j’aurais refusé aussi bien par principes que par crainte. Mais, comme bien des gens qui font des actes de hardiesse, j’allai en avant, parce que je n’eus pas le loisir de penser à tourner le dos. L’affaire fit peu d’éclat, et le roi, dit-on, a commandé qu’aucune enquête ne fût faite à ce sujet, par prudence, et par douceur sans doute, quoique mon oncle préfère attribuer l’indulgence de l’électeur de Hanovre, comme il l’appelle, tantôt à la pusillanimité, et tantôt à un mépris présomptueux de la faction qui conteste ses droits.

— Et les manœuvres qu’il vous a fallu exécuter sous la direction de ce fou d’enthousiaste ne vous ont-elles plus exposée depuis lors à d’aussi grands périls ?

— Non, — à aucun de la même espèce, quoique j’aie été témoin de bien des machinations étranges et désespérées par lesquelles, en dépit de tout obstacle, et au mépris de tout danger, il s’efforce de relever le courage d’un parti abattu. J’ai traversé en sa compagnie toute l’Angleterre et l’Écosse, et j’ai vu les scènes les plus extraordinaires et les plus différentes. Tantôt j’ai logé dans les châteaux de l’orgueilleuse noblesse des comtés de Chester et de Galles, où les aristocrates qui s’y sont retirés avec des principes aussi vieux que leurs habitations et leurs manières continuent à nourrir des opinions jacobites. La semaine d’après,