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Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 24, 1838.djvu/359

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recourant à un moyen si bas pour sauver sa vie, et l’absence de l’empereur, se réunirent pour retenir sur ses lèvres un secret qui n’importait pas seulement à sa fortune future, mais encore à son existence même. Il était donc, en attendant, comme plongé dans une mer de trouble et d’incertitude, et les pointes de terre qui semblaient lui offrir un refuge n’apparaissaient que dans le lointain, dans les ténèbres, et semblaient extrêmement difficiles à atteindre.


CHAPITRE XXXI.

LE PARDON.


Demain… oh ! c’est bientôt ! Épargne-le, épargne-le ; il n’est pas préparé à mourir.
Shakspeare.


Au moment où Tatius, sentant combien sa sûreté était compromise, cherchait à saisir le fil dangereux de la politique, un conseil privé de la famille impériale se tenait dans la salle appelée le Temple des Muses, que nous avons souvent désignée comme l’appartement où la princesse Anne Comnène avait coutume de faire ses lectures du soir. Le conseil se composait de l’impératrice Irène, de la princesse elle-même et de l’empereur ; le patriarche de l’église grecque y assistait en outre, comme une sorte de médiateur entre un excès de sévérité et un degré dangereux de douceur.

« Ne me débitez pas, Irène, disait l’empereur, toutes les belles choses qu’on peut dire en faveur de la pitié. Je viens de renoncer à ma vengeance si juste contre mon rival Ursel, et quel avantage en ai-je retiré ? Cet obstiné vieillard, au lieu de devenir traitable et d’être sensible à la générosité qui lui a laissé la vie et les yeux, ne consent qu’à peine à faire quelques efforts en faveur du prince à qui il en est redevable. J’avais coutume de croire que la vue et le souffle de la vie étaient des choses que l’on conservait au prix de tous les sacrifices ; maintenant, au contraire, je pense qu’on ne les estime que comme de simples joutes ; ne me parlez donc pas de la reconnaissance que je ferais naître en épargnant ce jeune ingrat ; et croyez, ma fille, » ajouta-t-il en se tournant vers Anne, « que non seulement tous mes sujets se riraient de moi si je pardonnais à un homme si ardent à me perdre, mais qu’encore vous seriez la première à me reprocher cette ridicule indulgence que vous faites maintenant tant d’efforts pour m’arracher. — Votre bon plaisir impérial, dit le patriarche, est donc irrévocablement que votre mal-