Aller au contenu

Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 24, 1838.djvu/369

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

regarder comme trahi, était de toutes parts entouré d’obstacles, les conspirateurs commencèrent à chercher les principaux personnages de leur parti, sur les ordres desquels ils comptaient dans le moment critique. Mais on ne voyait ni le césar ni Agelastès, soit dans la lice, soit dans la marche des troupes venant de Constantinople ; et quoique Achille Tatius fut arrivé avec le dernier détachement, il était facile de remarquer qu’il avait l’air d’obéir au protospathaire, loin d’avoir cette démarche indépendante qu’il aimait tant à affecter.

De cette manière, lorsque l’empereur, au milieu de son brillant cortège, approcha de la phalange que formaient Tancrède et ses compagnons, postés, comme on doit s’en souvenir, sur un promontoire élevé entre la ville et la lice, le principal corps de l’escorte impériale se détourna un peu de la route directe, afin de passer près d’eux sans briser les rangs ; tandis que le protospathaire et l’Acolouthos allèrent avec un détachement de Varangiens demander à Tancrède, de la part de l’empereur, la cause de son retour avec sa troupe. La courte distance fut bientôt parcourue. Le fameux trompette qui accompagnait les deux officiers sonna un pourparler, et Tancrède lui-même, remarquable par cette beauté de corps que le Tasse a préférée à celle de tous les autres croisés, à l’exception de Renaud d’Est, créature de sa poétique imagination, s’avança pour parlementer avec eux.

« L’empereur de la Grèce, dit le protospathaire à Tancrède, prie le prince d’Otrante de lui faire savoir, par les deux hauts officiers qui lui transmettent cette demande, dans quel dessein il est revenu, contre son serment, sur cette rive droite du détroit. L’empereur assure en même temps le prince Tancrède que rien ne lui plaira tant que de recevoir une réponse qui ne soit contraire ni à son traité avec le duc de Bouillon, ni au serment prêté par les nobles croisés et leurs soldats, attendu que l’empereur pourrait alors, conformément à son désir, montrer, par l’accueil bienveillant qu’il ferait à Tancrède et à sa troupe, combien haute est son estime pour la dignité de l’un et pour la bravoure de tous. Nous attendons une réponse. »

Le ton du message n’avait rien en soi de bien alarmant, et il ne fut pas très difficile au prince Tancrède d’y répondre : « Le motif, dit-il, qui amène ici le prince d’Otrante avec cinquante lances est le cartel qui annonce un combat entre Nicéphore Brienne, appelé le césar, occupant une place éminente dans cet empire, et un di-