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Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 8, 1838.djvu/33

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four d’un boulanger ; nous démolirons les murs de votre parc ; nous tuerons vos daims ; nous les mangerons, et vous n’en aurez pas même un morceau. Vous ne pourrez pas faire un manche de couteau de vingt sous avec leurs bois, ni couper une paire de culottes avec leur peau ; vous ne trouverez ni secours ni appui chez le traître Henri Lee, dont les biens sont séquestrés, lui qui s’était donné le nom de capitaine de Woodstock ; car ils viennent ici ceux qu’on appellera Maher-Shalal-Hash-Baz, pour s’emparer du butin. »

Ici se termina ce sermon extraordinaire : la fin remplit d’alarme les pauvres bourgeois de Woodstock, en leur confirmant un bruit fâcheux qui avait couru depuis peu. Les communications avec Londres étaient lentes, et les nouvelles qui en arrivaient, incertaines ; les temps eux-mêmes n’étaient pas moins variables, et les bruits qui circulaient étaient exagérés par les craintes ou les espérances des diverses factions. Mais les dernières nouvelles relatives à Woodstock étaient toutes uniformes. On avait appris successivement d’un jour à l’autre qu’une résolution fatale avait été prise par le parlement pour vendre le parc royal de Woodstock, détruire sa Loge, démolir les murs de son parc, et détruire entièrement les traces de son ancienne gloire. Beaucoup d’habitants devaient souffrir de ces mesures ; la plupart jouissaient, soit légitimement, soit par faveur, de différents priviléges avantageux, tels que de faire paître leurs troupeaux, de couper du bois, etc., dans le domaine royal. D’ailleurs tous les habitants de cette petite ville pensaient avec peine que toute la beauté du lieu qu’ils habitaient allait disparaître ; que les monuments en seraient détruits, la splendeur anéantie. Un pareil sentiment patriotique se retrouve souvent dans les petites villes que d’anciens monuments et des souvenirs antiques long-temps chéris rendent si différentes des villes d’une date plus récente. Ce sentiment, les habitants de Woodstock l’éprouvaient au dernier point. L’annonce seule de ce malheur les avait remplis d’effroi ; et il n’y avait plus à en douter, depuis l’arrivée de ces soldats, sombres, fanatiques et tout-puissants ; et l’ayant entendu proclamer par un de leurs prédicateurs militaires, ils regardaient ce désastre comme inévitable. Les dissensions qui les divisaient furent pour le moment oubliées, et les assistants, congédiés sans psalmodie ni bénédiction, sortirent lentement et tristement, et se retirèrent chacun chez soi.