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Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 9, 1838.djvu/227

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de la semaine pour essaimer ; mais, voyez-vous, elles attendent toujours pour cela le jour du sabbat, comme pour empêcher les gens d’aller au sermon. On ne peut pourtant se plaindre aujourd’hui, car on n’a pas prêché à la chapelle de Graneagain.

— Vous auriez pu aller à l’église de la paroisse, André ; vous auriez entendu un excellent sermon.

— Des os de perdrix froide ! des os de perdrix froide ! reprit André avec un sourire dédaigneux, assez bons pour des chiens, sauf votre respect. Oui ! j’aurais pu certainement entendre le ministre chanter avec sa chemise blanche, et les musiciens jouer de leurs sifflets ; cela ressemble plutôt à une noce à deux pences qu’à un sermon. Et de plus j’aurais pu entendre Daddie Docharty murmurer sa messe ; j’en aurais tiré grand profit !

— Docharty ! lui dis-je (c’était le nom d’un vieux prêtre irlandais, je pense, qui officiait quelquefois à Osbaldistone-Hall), je croyais que le P. Vaughan était au château ; il y était hier.

— Oui, répondit André, mais il est parti hier soir pour aller à Greystock, ou quelque part de ce côté dans l’ouest. Il y a du mouvement par là. Ils sont dans l’agitation comme mes abeilles. Dieu les sauve ! je comparerais tout de même les pauvres bêtes aux papistes ! Vous voyez, voilà le second essaim d’aujourd’hui ; le premier est parti ce matin. Mais les voilà rentrées pour la nuit. Ainsi je souhaite à Votre Honneur le bonsoir et les bénédictions du ciel. »

À ces mots André se retira en jetant un coup d’œil sur ses ruches.

J’avais tiré de lui indirectement une information importante, c’était que le P. Vaughan n’était plus au château. Si donc j’apercevais de la lumière dans la bibliothèque, ou ce n’était pas lui, ou il observait une règle de conduite bien secrète et bien mystérieuse. J’attendis avec impatience l’arrivée de la nuit. À peine le soleil fut-il couché, que je vis par les fenêtres de la bibliothèque une lueur qu’on distinguait difficilement dans le demi-jour du crépuscule. Je la remarquai toutefois aussi promptement que le matelot anuité découvre dans le lointain la première lueur du fanal qui dirige sa course. L’hésitation, le sentiment des convenances, qui avaient déjà lutté si fortement contre ma curiosité et ma jalousie, s’évanouirent quand l’occasion s’offrit de satisfaire ces deux passions. Je rentrai dans la maison, et évitant les appartements les plus fréquentés, comme un homme qui veut