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Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 9, 1838.djvu/245

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aurait un bureau de poste, pour l’informer de la réparation que je projetais ; il me semblait inutile, en attendant, de tancer André sur cette action, qui, dans le fait, n’avait rien de très-extraordinaire dans sa position. J’étouffai donc mon ressentiment, et lui demandai ce que signifiaient ces dernières expressions que bientôt il y aurait moins de justice dans le Northumberland.

« De justice ! dit André, ah ! oui, il y en aura assez, mais ce sera celle qui se fait au bout du bâton… Les prêtres et les officiers irlandais et tout ce bétail papiste, qui ont été camper ailleurs parce qu’ils n’osaient plus rester dans le pays, reviennent en troupe maintenant dans le Northumberland. Et ces corbeaux-là ne s’y rassembleraient pas s’ils ne sentaient quelque charogne. Aussi sûr que vous existez, sir Hildebrand trempe dans tout cela, car on ne voit au château que pistolets et fusils, épées et poignards ; et ce n’est pas pour rien, je vous garantis : ces jeunes Osbaldistone, d’ailleurs (j’en demande pardon à Votre Honneur), sont des écervelés qui n’ont peur de rien. »

Ces paroles me rappelèrent les soupçons que j’avais conçus moi-même que les jacobites étaient à la veille de quelque entreprise désespérée. Mais sentant qu’il ne me convenait pas de m’ériger en espion des actions et des paroles de mon oncle, j’avais plus fui que recherché l’occasion de me mettre au courant de ce qui se passait. André Fairservice ne connaissait pas un pareil scrupule, et il parlait sans doute très-sincèrement en disant qu’une des raisons qui l’avaient déterminé à quitter le château était la conviction qu’il s’y tramait quelque complot désespéré.

« Les domestiques, me dit-il, ainsi que tous les tenanciers et paysans, ont été enrôlés et passés en revue, et l’on voulait me faire prendre les armes aussi à moi… mais je ne me soucie pas de faire partie d’une telle troupe, et ceux qui me le demandaient ne connaissaient guère André… Non, non : je me battrai comme un autre quand il me plaira, mais ce ne sera ni pour la prostituée de Babylone, ni pour celle d’Angleterre non plus. »