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Page:Œuvres mêlées 1865 III.djvu/107

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prendre ce qu’elle souhaitoit de moi ; et tout ce que je pouvois faire pour son service, la voyant fort désolée, et l’aimant tendrement, c’étoit de pleurer avec elle son malheur, en attendant qu’elle m’aidât à pleurer les miens.

Le chagrin que M. le cardinal avoit de sa liaison avec le Roi lui avoit donné une grande aversion pour elle ; et comme cette intrigue avoit commencé d’abord qu’elle parut dans le monde, on peut presque dire qu’il ne l’avoit jamais aimée. L’humeur de mon frère ne lui plaisoit guère davantage, et sa conduite encore moins, surtout depuis qu’on l’accusa d’avoir été de la débauche de Roissi8 : car une des choses sur lesquelles il étoit plus mécontent de nous, c’étoit la dévotion. Vous ne sauriez croire combien le peu que nous en avions le touchoit. Il n’est point de raisons qu’il n’employât pour nous en inspirer. Une fois, entre autres, se plaignant de ce que nous n’entendions pas la messe tous les jours, il nous reprocha que nous n’avions ni piété ni honneur. Au moins, disoit-il, si vous ne l’entendez pas pour Dieu, entendez-la pour le monde.

Quoique j’eusse autant de part que les autres à ses remontrances, néanmoins, soit que comme la plus jeune, il me jugeât la moins blâmable, soit qu’il y eût quelque chose dans mon humeur qui lui



8. Le comte de Guiche, le comte de Bussy-Rabutin et Manicamp, étoient de cette débauche, qui se fit à Roissi, terre du comte de Vivonne, à quatre lieues de Paris, en 1659. Voy. l’Histoire amoureuse des Gaules, les Mémoires du comte de Bussy-Rabutin, et suiv., et notre Introduction historique, p. cxlix.