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Page:About - La Grèce contemporaine.djvu/363

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sans cesser un instant de compter les grains de son chapelet.

On rencontre à la musique un certain nombre de bourgeoises qui ne mettent le nez dehors qu’une fois par semaine. Leurs maris les font sortir tout habillées d’une boîte dont ils ont la clef ; ils leur donnent un coup de brosse, et les exposent au grand air jusqu’au soir. Après la musique, elles rentrent dans leur coffre, que l’on referme hermétiquement.

Ces dames sont en grande toilette : la toilette est une des plaies de la société athénienne. Tel employé à douze cents francs achète à sa femme une robe de moire antique blanche ou rose, qu’on voit traîner tous les dimanches dans la poussière. Ces tristes poupées s’avancent majestueusement, un mouchoir brodé à la main. C’est le seul mouchoir de la maison. Les hommes de toute condition se mouchent dans leurs doigts avec une grande dextérité. Les riches bourgeois s’essuient après avec leur mouchoir. La haute société se mouche à la française et n’en est pas plus fière.

Dans un coin écarté, le long d’un mur, s’entassent les servantes, les ouvrières, les Albanaises et toute la classe des femmes pauvres. C’est dans ce fouillis de bras et de jambes qu’on découvre les plus beaux profils et les figures les plus distinguées. J’ai vu des servantes venues de Naxos ou de Milo qui auraient éclipsé toutes les femmes de Paris, si l’on avait pu les faire infuser six mois dans une eau courante.

À l’heure indiquée pour le commencement de la cérémonie, le colonel, qui en remontrerait au soleil pour l’exactitude, fait un signe à l’orchestre. On joue