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Page:About - La Grèce contemporaine.djvu/362

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Les musiciens, en uniforme militaire, ne se font pas attendre : ils vont s’établir sous leur kiosque de bois blanc. Bientôt on voit apparaître le panache du colonel Touret. Les musiciens ne consentiraient jamais à jouer si le colonel n’était pas là. Il se tient sur la route, devant le petit pont qui la relie à la place. C’est là qu’il attend leurs majestés, en caracolant : son cheval n’a jamais plus de deux pieds à terre. Le préfet de police, en costume de Pallicare, arrive ensuite, le gourdin à la main. Ses employés, qu’on n’aimerait point à rencontrer au coin d’un bois, sont autour de lui ; chacun d’eux porte un bâton où l’on a écrit, pour rassurer le public : Force de la loi. Sur un ordre du colonel, le piquet de soldats s’éparpille de manière à décrire un grand cercle autour des musiciens. Derrière eux viennent se ranger les voitures ; derrière les voitures, circulent les piétons et les cavaliers.

Les marchands d’Athènes se promènent avec leurs femmes et leurs enfants, en grande toilette. Le chef de la famille roule dans ses doigts un gros chapelet qui n’est pas un instrument de religion, mais un passe-temps, un jouet de grandes personnes, dont on s’amuse à compter les grains machinalement et sans y penser. Cet exercice très doux finit par devenir un besoin pour ceux qui en ont pris l’habitude, et je connais des français de beaucoup d’esprit, qui ont quitté la Grèce depuis plusieurs années, qui ont des occupations sérieuses, une vie pleine et agitée, et qui ne se possèdent plus lorsqu’ils n’ont pas ce chapelet entre les doigts : tant l’habitude les a bien ensorcelés ! J’ai vu en Grèce le président du sénat diriger une discussion orageuse