Aller au contenu

Page:About - La Grèce contemporaine.djvu/77

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

jourd’hui. Il ne le sera jamais en Grèce. Pour l’élever au rang où il est parvenu, il a fallu l’autorité du roi : les ministres ne lui veulent aucun bien[1]. Le colonel a pour le roi le dévouement le plus passionné. Il s’est nommé lui-même conservateur de la vie du roi, et il vaque nuit et jour à cette fonction toute gratuite. Que le roi sorte à cheval, qu’il sorte en voiture, le colonel chevauche à ses côtés. Au mois d’avril 1852, le roi et la reine revenaient à quatre heures du matin du Pirée, où l’amiral Romain Desfossés leur avait donné un bal à son bord : le colonel, à cheval à la portière de la voiture, veillait au salut de ses chères Majestés. Son cheval, un cheval de troupe qu’il avait emprunté pour la circonstance, fut frappé d’apoplexie, et tomba. Le roi et la reine étaient déjà au palais, que le colonel, étendu auprès de sa monture, une jambe engagée sous la selle, attendait encore qu’on vînt le relever. Le ministre de la guerre réclama le prix du cheval.

Le colonel Touret a pour commensal et pour ami un autre philhellène, Vénitien de naissance, le général Morandi. M. Morandi est homme d’esprit comme tous les Italiens, et homme de tête comme presque tous les Lombards. Je n’ai jamais rencontré d’homme plus pénétrant, plus subtil, qui connût mieux les hommes, ni qui eût moins conservé d’illusions. Il était né pour organiser la gendarmerie dans un pays de brigands ; et c’est ce qu’il a fait en Grèce. Après

  1. Le colonel est en faveur depuis l’occupation anglo-française. Il commande la place d’Athènes. Il vient d’organiser un corps de pompiers, dont la ville avait bon besoin.
    (Note de la 2e édition.)