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Page:Académie française - Recueil des discours, 1890-1899, 2e partie, 1900.djvu/220

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pas à la superficie des choses, mais qu’il essayât d’en saisir et d’en exprimer le sens intérieur, la signification ultérieure et cachée. Nous demandions encore qu’il ne se fît pas un jeu cruel des misères de l’humanité, mais qu’il mît un peu de son cœur dans son œuvre, et qu’il comprît, qu’il sentît, qu’il aimât « la majesté des souffrances humaines ». Et nous demandions enfin, nous lui demandions de se sonvenir que ce n’est pas l’homme qui a été inventé pour l’art, mais l’art qui a été créé pour l’homme, et par l’homme, pour nous être une consolation de la vulgarité de l’existence, une invitation quotidienne à nous élever au-dessus de nous-mêmes, et quelque explication du mystère de notre destinée. C’est le changement que nous avons vu, Monsieur, s’accomplir depuis quinze ans, et nous avons au moins le droit de nous en rejouir ensemble ?

Aussi bien,


Est-ce un droit qu’à la porte on acquiert en entrant ;


et ces idées, vous ne l’ignorez pas, forment la substance de tout ce que l’on s’honore ici de conserver sous le nom de tradition. « Ce qu’en tout temps il y a de plus vivant dans le présent, aimait à dire un de nos confrères, — c’est peut-être le passé » ; et il entendait par là que, sous la fluidité continuelle des apparences, il y a pourtant quelque chose qui dure et qui demeure. Nos morts ne retournent pas tout entiers au néant ; et nous ne vivons généralement que de l’héritage qu’ils nous ont transmis. N’est-ce pas ce que nous croyons, ce que nous avons toujours cru, vous et moi, comme lui ? Si je cherche la raison de cette vivaci