Aller au contenu

Page:Académie française - Recueil des discours, 1890-1899, 2e partie, 1900.djvu/360

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

malin, dont les subtiles inventions, dures à croire pour qui ne les a vues, égayaient les festins du bon roy Artus, autour de cette table qu’on avait voulue ronde pour que chaque place y fût place d’honneur, où des héros surhumains racontaient leurs périls, leurs dangers, leurs gentillesses de courage, et les hasards charmants de leurs merveilleuses aventures. Vous avez partagé les angoisses de la reine Pédauque et chevauché dans vos rêves Alfane et Bayard, ces admirables coursiers, supérieurs à Bucéphale, comme les fictions des poètes aux mensonges de l’histoire.

À ces brillants préludes d’un esprit rêveur et curieux succéda pour vous la discipline de nos lycées. Votre nom a retenti sous les voûtes de la Sorbonne. Les vaincus de ces luttes enfantines ont le droit d’en appeler à l’avenir, les vainqueurs, celui d’y travailler avec confiance.

Vous avez traversé les universités de Bonn et de Göttingue, ces oasis de l’esprit où l’on ignore les programmes. De grands maîtres, devenus vos amis, ont affermi vos pas vers notre École des chartes, où votre thèse, premier essai d’un grand savoir, a été justement remarquée. Vous y distinguez ingénieusement, dans l’histoire du langage, l’usance commune du menu peuple, de la langue écrite par les clercs. Les bonnes lettres fournissent des raisons pour échapper aux lois incertaines de la Science, l’ignorance, forissue de sens logical, comme dit Rabelais, les respecte instinctivement sans les connaître.

Le vieux Poème de Saint-Alexis est aujourd’hui, grâce à vous, le fragment le plus considérable et le plus judicieusement restauré des trouvères du XIe siècle. La grammaire vous possédait alors. Les vocales et les consonnantes gut-