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Page:Académie française - Recueil des discours, 1890-1899, 2e partie, 1900.djvu/361

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turales, labiales ou dentales, les conjugaisons, les assonances et les rimes, étaient votre butin préféré et l’objet de vos doctes critiques. Nos aïeux, laissant aux clercs cette savante besogne, se plaisaient aux détails du récit.

Alexis, jeune homme romain de riche et haute famille, est ardemment chrétien, il aspire au martyr, et pendant son pèlerinage vers le ciel

Plus aime Dieu que nule rien vivant.

Soumis à son père, et cédant à l’iniquité du siècle, il épouse, contre toute raison, une jeune patricienne qu’il trouve trop aimante et trop belle. Après les solennités d’une noce dont les magnificences l’ont attristé, Alexis est plein de repentance, crucifié au monde, il arrête ses pensées, fort à contretemps, sur le précepte célèbre : « Soyez mariés comme ne l’étant pas. » On l’introduit dans la chambre nuptiale, où la jeune épouse, préparée à le recevoir, sourit à de douces pensées. Dieu incline son cœur à lui faire un sermon :

La mortel vie li prist molt à blamer
De la celest li monstrer vérité.

La belle n’est nullement en humeur d’ascétisme ; folâtre et gracieuse, elle ouvre les bras à son époux, et tendrement émue, demande sans rougir à se laisser aimer. Alexis rougit pour elle.

Bêle, dit-il, vous n’estes mis sénée.

Elle renvoie le reproche.

— Pourquoi m’as-tu épousée ? lui demande-t-elle avec