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Page:Académie française - Recueil des discours, 1890-1899, 2e partie, 1900.djvu/370

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l’autre, devenir un de nos plus éminents confrères : « Votre leçon était détestable, lui dit-il, si les suivantes ne sont pas meilleures, vous nous ferez regretter de vous avoir mis en évidence. » Nous n’avons rien eu à regretter.

Il est aisé d’imiter cette rudesse, mais qui enseignera le secret de la réserver pour ceux dont l’esprit est assez fort pour en profiter, le cœur assez droit pour en garder un reconnaissant souvenir ?

La réception de Pasteur à l’Académie française fut un brillant tournoi ; vous l’avez rappelé. L’illustre récipiendaire ne cachait pas son drapeau, pieusement spiritualiste. Le Directeur de l’Académie, c’était Renan, les saluait tous avec un dédaigneux respect. Le nom du savant prédécesseur de Pasteur, c’était Littré, évoquait celui de son maître Auguste Comte. Dans une occasion où la bienveillance embellit tout, ni Pasteur qui n’était pas habile, ni Renan qui l’était beaucoup, ne trouvèrent une parole indulgente pour cette philosophie si mal nommée positive, qui juge de toute chose dans un si pauvre style. Pasteur en a expliqué le succès :

Auguste Comte, dit-il, a fait croire aux esprits superficiels que son système repose sur les mêmes principes que la méthode scientifique dont Archimède, Galilée, Pascal, Newton, Lavoisier, sont les vrais fondateurs. De là est venue l’illusion des esprits.

Lorsque, dans le style majestueux dont on admirait l’éclat, Renan disait à Pasteur : Votre vie scientifique est comme une traînée dans la grande nuit de l’infiniment petit, dans les dernières limites de l’être où naît la vie, il répondait mal aux humbles aspirations de sa foi. Entre la science et la création de la vie, Pasteur apercevait l’infini.