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Page:Achille Essebac - Luc.djvu/168

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LUC

— Mince ! il est rien chouette, le même ! — dont Lucet rit tout seul en s’allongeant en travers du coupé pour ne pas détendre son maillot.

Puis, ainsi demi-nu, par un beau temps très doux, il traversa tous les boulevards, la rue Royale, les Champs-Elysées jusqu’aux Invalides. Quelques-uns, sous les flots d’électricité d’un grand candélabre, le remarquèrent et le reconnurent du côté de chez « Maxim’s », et une touffe d’œillets tomba dans le coupé sur la clarté ronde de ses genoux, sans qu’il put voir d’où venaient les fleurs…

La comtesse vint elle-même, en personne, au foyer improvisé dans un des merveilleux salons de son hôtel. Avec une bonne grâce toute charmante, elle remit à Luc son cachet, dans une jolie bourse en mailles d’or qui, même en tenant compte de deux courtes répétitions, triplait au moins les cinq louis demandés.

Julien reçut pour son jeune ami les compliments de tous. Sa liaison avec Luc Aubry était fameuse depuis le succès de Daphnis et Chloé dont il avait refusé, de lord Eaton, un chèque énorme. Ce refus même, diversement apprécié, n’avait fait qu’ajouter à l’étrange de cette situation qu’il était peut-être seul, avec Luc et les Marcelot, à savoir d’une absolue pureté. S’il déplorait d’ailleurs qu’un autre tour eût été donné à cette sympathie demeurée toute intellectuelle et désintéressée, il ne le redoutait pas.

Mais ce monde ultra-élégant et dont les noms ne pouvaient donner prise, ostensiblement du moins, à aucune insinuation malveillante, se faisait un jeu de croire à l’intimité qui flattait son snobisme, ses ins-