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Page:Achille Essebac - Luc.djvu/193

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LUC
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Et plus elle relisait ces lettres, dont quelques-unes dépassaient l’audace de celle-ci, plus elle les relisait, plus s’épanouissait, dans la splendeur du parc brûlant sous le soleil de Messidor, l’inéluctable besoin d’aimer ; son corps et son cœur criaient comme les boiseries des meubles immobiles, dans la nuit ; mais le cœur, mais le corps de tous ainsi criaient l’hymne au renouveau, l’hymne doux et violent au partage des joies et des transports que promènent dans le corps inquiet les méandres bleus des veines !

Nine se rendait mieux compte, maintenant, des câlineries charmantes et puériles de son autre grand ami pour Luc, de son autre grand ami Julien. Il est robuste, celui-ci, viril tout à fait, tandis que Luc est plutôt mignon bien qu’il ne s’abandonne jamais, ni dans ses vêtements, ni dans ses paroles, ni dans sa tenue, à aucune mièvrerie bonne pour les femmes, et dont il a horreur. Julien fait un peu peur à Nine, comme Nine à Chérubin. Tandis que Chérubin au contraire ne lui donne que de l’audace. Oh ! ses lettres ne laissent plus aucun doute. D’autres ont passé, dont les bras et la bouche cueillirent un peu de la moisson souriante de ses yeux railleurs et de ses lèvres spirituelles. Ne va-t-elle que glaner ? Non ! ce sera pour elle, sans crainte, la réalisation de toutes les folies que ses aveux ont arrachées à la plume de Lucet. Les mots tremblent là, sous ses yeux, sous ses doigts ; les mots en lesquels Chérubin se déshabille tout entier, mieux encore que dans sa loge au théâtre ; de ce déshabillage il livre les détails un à un, dans chaque lettre. Nine a failli se trahir en les lui demandant, Luc n’ayant pu se défendre de lui dire qu’une