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Page:Achille Essebac - Luc.djvu/35

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LUC

coup de crayon jusqu’aux tempes diaphanes comme une cire pâle, donnaient un air de grandeur et de langueur royales à sa sinueuse souplesse. Un monde, quand elle marchait, semblait naître dans son sillage. Des paillettes d’or et de jais se détachaient de l’abondance de ses tulles et restaient sur le tapis sous ses pas, comme si des choses brillantes et légères devaient marquer sa trace partout : fleurs, bravos, parfums, sourires, soieries et pierreries, fards en poudre et musiques en émoi, morceaux d’étoiles, mousse, clinquant, battage et chiqué. On l’avait dit : princesse du battage et reine du chiqué ! Dans notre monde de trônes et d’alcôves, cette royauté égale les autres non moins incertaines et éphémères, et se justifie mieux. Déah avait connu des triomphes intraduisibles. Elle avait vu des peuples dételer les chevaux de ses voitures et mille bras traîner le poids précieux de sa personne. Des empires restaient sous le charme de son talent. Des poètes devaient à son génie l’essor du leur. Et les foules savaient ; et le nom de Déah Swindor était synonyme de Gloire et de Beauté.

Quand tous les froufrous et les brouhahas de ses falbalas se furent assoupis, quand se furent immobilisés les rutilements des paillettes, dans le repos d’un fauteuil rapidement avancé vers elle, ce fut une cour. Et comme autour des vrais trônes, des méchancetés, des envies, des platitudes et des intrigues s’empressèrent. Seul, Luc demeurait droit dans l’inflexion des courbettes et la fluctuation des hommages. Or, tandis que le bourdonnement servile des autres laissait indifférente la grande comédienne, la tranquillité du jeune garçon requit son attention par le dépit qu’elle

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