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Page:Acremant - Ces Dames aux chapeaux vert, 1922.djvu/19

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CES DAMES AUX CHAPEAUX VERTS

— De loin, on juge mal…

— Non, non… Je t’assure que, même si je voulais aller chez elles, elles ne me recevraient pas… À leur âge on a le cœur ratatiné…

— Eh bien ! tu te trompes…

— Crois-tu ?

— Me Clapeau leur a écrit, il leur a dit ton caractère gai, enthousiaste, indépendant. Il ne leur a rien dissimulé de l’éducation un peu… un peu…

— Un peu… quoi ?

— Un peu artiste que tu as reçue. Il leur a demandé si elles voient un inconvénient à ce que tu te réfugies chez elles.

— Elles ont répondu : oui ?

— Elles ont répondu : non, par lettre fort aimable, affirmant qu’elles te donneront les bons conseils dont tu dois avoir grand besoin…

— C’est charmant !

— Nous n’avons pas le droit de nous montrer difficiles…

— D’après toi, je dois donc accepter ?

— Je ne sais pas… C’est à toi qu’il appartient de décider… Réfléchis… Pèse le pour et le contre…

— Je ne me sens aucun goût de jouer les Pénélope en province… Je n’ai jamais aimé faire de la tapisserie…


Arlette a dix-huit ans, elle vit dans un perpétuel contraste, physiquement et moralement. Ses cheveux sont blonds et ses yeux sont noirs. Elle est plutôt petite et paraît grande, tant elle est mince et souple. Elle semble aimer le monde et l’agitation, elle pratique les sports. Elle n’est vraiment heureuse que dans sa chambre, avec ses chiens, ses poissons rouges, ses bouts de rubans et ses faveurs, ses bouquets de roses et ses rêves bleus ! Elle prend volontiers des airs excentriques, mais c’est pour mieux cacher sa tendresse, car elle est surtout sentimentale. Évidemment elle est mal élevée, elle parle argot. On a eu le tort de rire aux premiers mots qu’elle a prononcés ainsi, elle a continué. Ses professeurs déclaraient qu’elle était une enfant terrible. Son seul crime était de voir trop