Page:Agoult - Histoire de la révolution de 1848, tome 1.djvu/424

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
408
HISTOIRE

verrons bientôt comment elles furent comprises et interprétées par les partis.

Pendant que M. Ledru-Rollin essayait de saisir les rênes de la révolution à l’intérieur, M. de Lamartine, en s’installant au ministère des affaires étrangères, préparait les instructions qu’il allait donner aux agents diplomatiques et fixait dans son esprit l’attitude qu’il convenait à la République de prendre vis-à-vis des puissances européennes.

Comme tous les autres édifices, le ministère des affaires étrangères avait été envahi par les combattants ; mais, malgré la haine personnelle que le peuple de Paris portait à M. Guizot, malgré l’irritation produite par la catastrophe de la veille, tout y avait été respecté. Ces simples mots tracés à la craie, le 24 février, sur la porte d’entrée : Ambulance, respect aux blessés, et les efforts individuels de quelques ouvriers avaient suffi pour retenir une bande furieuse qui menaçait de mettre le feu. Quand la garde nationale arriva, le 25, sur un ordre du maire du premier arrondissement, au nom du salut public, elle trouva partout l’ordre et la discipline. À tous les étages, les ouvriers avaient d’eux-mêmes établi des postes de sûreté. Aux portes des archives, à l’entrée même du cabinet particulier de M. Guizot, des factionnaires en blouse gardaient religieusement les secrets d’un gouvernement et d’un homme détestés. La garde nationale se mêla aux bandes populaires. On bivouaquait ensemble dans les cours, dans les antichambres, sur les escaliers, en s’entretenant des événements accomplis, avec une simplicité cordiale. Sur ces entrefaites, M. Bastide, envoyé par le gouvernement provisoire, vint se faire reconnaître en qualité de sous-secrétaire d’État au ministère. Il était suivi de M. Hetzel, nommé chef du cabinet de M. de Lamartine, et de M. Payer qui devait remplir auprès du ministre les fonctions de secrétaire. La principale occupation de ces nouveaux fonctionnaires, pendant vingt-quatre heures, fut de signer des passe-ports pour les peureux, parisiens ou étrangers, qui, selon l’opinion qu’on s’était faite du peuple