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Page:Aimard - Le forestier.djvu/170

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Le Forestier par Gustave Aimard

— Pardieu !

— Bon j’ai quelqu’un à te présenter.

— Qui donc ?

Mon guide indien, un homme précieux.

— Comme tu voudras, à ce soir.

— À ce soir.

— N’oublie pas Barthélemy.

— Sois tranquille.

Les trois boucaniers se serrèrent la main. Vent-en-Panne sortit.

Le capitaine Laurent employa la journée entière à faire des visites d’apparat ; partout il fut reçu de la façon la plus distinguée ; le nom qu’il il portait, le titre dont il s’était affublé et, plus que tout, ses manières aristocratiques sans masque trompeur étaient des passeports qui lui ouvrirent les portes toutes grandes. À l’accueil qui, partout, lui fut fait, il reconnut facilement que sa position était excellente et qu’il pouvait tout oser.

Le gouverneur surtout, don Ramon de la Crux, fut parfait pour lui : il voulut absolument lui présenter sa femme et sa fille charmante enfant de quinze ans, belle de cette excentrique beauté que possèdent seules les créoles espagnoles, et dont les regards le transpercèrent comme deux traits de flamme.

Don Ramon de la Crux ne consentit à laisser partir le comte de Castel Moreno que lorsque celui-ci se fut engagé formellement à dinar le lendemain au palais du gouvernement, en compagnie de toute la haute société de la ville.

Rentré chez lui vers six heures du soir, le capitaine Laurent trouva Vent-en-Panne qui l’attendait.

Selon sa promesse, il lui présenta José, que le flibustier jugea du premier coup d’œil, et pour lequel il se prit d’une belle amitié tout aussitôt.

Laurent, Vent-en-Panne. Michel et José dinèrent ensemble, servis avec le plus grand décorum et le plus profond respect par les flibustiers.

Les braves Frères de la Côte avaient pris leurs rotes au sérieux, et s’en acquittaient en conscience.

À la Un du repas, Laurent se pencha vers José.

— Avez-vous songé à nos camarades ? lui demanda t-il.

— J’ai déjà entamé des négociations, je compte sur une réussite prochaine.

— Quand doit-on les juger ?

— Dans cinq jours.

— I nous reste bien peu de temps.