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Page:Aimard - Les Peaux-Rouges de Paris.djvu/137

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quand vous vous êtes séparé de moi dans la cour des messageries Lafitte et Gaillard ?

— Je t’ai fait beaucoup de recommandations, garçon, et je me plais à constater que tu as tenu compte de toutes ; remets-moi sur la voie, sinon nous n’en sortirons jamais.

— Vous m’avez dit entre autres choses : dans tes moments perdus, fais de la gymnastique sous toutes les formes, cela te rendra sinon fort, du moins adroit ; au physique comme au moral, l’adresse égalise les forces, souviens-toi de cela.

— C’est vrai, je t’ai fait cette recommandation ; le cas échéant je te la ferai encore.

— Eh bien ! mon père, je vous ai obéi comme toujours.

— C’est-à-dire ?

— J’ai appris tout ce qu’il m’a été possible d’apprendre en gymnastique : ainsi j’ai fréquenté la salle de Grisier, celles de Leboucher et de Lacour ; je suis allé au tir, au manège, j’ai pris un professeur de natation, un maître de boxe anglaise.

— De sorte ?

— De sorte, père, reprit le jeune homme en riant, que je suis de première force à l’épée, au pistolet, à la canne, au bâton, au sabre, à la boxe, que je monte à cheval comme Baucher, et que je nage comme un esturgeon.

— Oh ! oh ! je crois que je commence à comprendre ; vous vous êtes battus comme deux cerveaux brûlés, avec vos mâkhil bal de néflier ; et, grâce à ton adresse supérieure, tu as infligé une correction exemplaire à ce bravache.

— Oui, père, sans qu’il ait réussi à me porter un seul coup ; je l’aurais tué, si je n’avais pas eu pitié de lui.

— C’est mon avis ; je le lui ai dit à lui-même.

— Et il ne vous a pas avoué que j’étais son adversaire ?

— Il ne m’en a pas soufflé mot.

— Je m’en doutais. Ah ! si j’avais su que vous le soigniez !