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Page:Aimard - Les Peaux-Rouges de Paris.djvu/347

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La marche continua pendant un laps de temps assez considérable, sans que la conversation fût reprise entre les trois personnages.

Les deux chasseurs, respectant le mutisme de la belle voyageuse, rêvaient de leur côté.

La comtesse jouait avec Vanda, que Clairette, la camériste, avait placée à califourchon sur le devant de la selle de sa maîtresse.

Le Cœur-Sombre suivait du regard la gentille fillette, dont l’innocent babil semblait de plus en plus l’intéresser presque malgré lui.

Enfin, n’y pouvant tenir davantage :

— Voilà une bien charmante enfant ! s’écria-t-il pour dire quelque chose.

En réalité, ce long silence, qu’il ne savait à quoi attribuer, lui pesait.

— N’est-ce pas ? répondit aussitôt la comtesse en souriant.

— Certes, madame, et vous semblez beaucoup l’aimer.

— Oh ! oui, répondit-elle avec sentiment ; je l’aime comme si elle était ma fille.

— C’est sans doute l’enfant d’un ami bien cher ? dit Main-de-Fer, en se mêlant à la conversation.

La comtesse sourit sans répondre.

Elle embrassa la fillette à plusieurs reprises, la remit à Clairette, qui la replaça sur Jaguarita.

Puis elle fit un signe presque imperceptible à la camériste, qui arrêta son cheval et resta ainsi un peu en arrière et hors de portée de la voix.

— Cette chère enfant, dit alors la comtesse, n’est pas la fille d’un ami ou d’un parent, elle m’a été léguée par la Providence.

— Comment par la Providence ? s’écria Main-de-Fer.

— Oui, reprit en souriant la comtesse.

— C’est étrange, murmura Cœur-Sombre.

— Je n’y suis plus du tout, ponctua Main-de-Fer.

— En effet, cela doit vous sembler une énigme.