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Page:Aimard - Les Peaux-Rouges de Paris.djvu/422

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geant les idées de la jeune fille, lui rendit le courage.

Il était embarqué et faisait voile pour le Mexique, où il allait revoir la comtesse qui lui donnerait des nouvelles de leur cher Julian.

Bientôt elle viendrait, elle aussi, au Mexique, et tous ses chagrins finiraient ; mais, pour cela, il fallait qu’elle fût forte ; qu’elle eût du courage et ne se laissât pas abattre.

— Je serai forte ! murmura-t-elle en baisant pieusement la lettre : je veux vivre pour lui et pour Julian.

Et elle tint parole.

Denizà n’était pas une femme vulgaire, elle l’avait prouvé plus d’une fois.

Elle eut honte de sa faiblesse, elle voulut vivre et redevenir belle.

Non pour elle, mais pour son père adoptif et pour son fiancé.

Elle réussit à tel point, qu’en la voyant caime, souriante, gaie même, chacun s’y trompa.

Personne, excepté Mariette, que son dévouement rendait clairvoyante, ne découvrit les douleurs cachées sous ces apparences si doucement trompeuses.

Mais Mariette feignit, elle aussi, de ne rien voir, ce qui rendit à la chère malade toutes les forces nécessaires pour jouer son innocente comédie.

Près d’un an s’était écoulé depuis le départ, du docteur.

Des bruits sinistres se répandaient sur l’expédition.

On parlait de défaite, de retraite, de maladies terribles qui décimaient l’armée.

L’inquiétude était à son comble ; une seconde expédition se préparait, mais considérable celle-là, et placée sous les ordres du général Forey.

Tous ces bruits sinistres se répandaient avec la rapidité d’une traînée de poudre, bien que murmurés et chuchotés à voix basse.

Car sous l’Empire, il ne fallait pas se risquer à parler haut. Cayenne et Lambessa étaient là pour bâillonner les imprudents.