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Page:Aimard - Les Peaux-Rouges de Paris.djvu/86

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cation bizarre avait été indiqué et recommandé à mon père par le célèbre docteur Dubois, afin de combattre des symptômes de phthisie qui apparaissaient en moi. Ma pauvre mère est morte toute jeune de la poitrine, et l’on craignait avec raison que je ne fusse atteinte de cette horrible affection. Vous voyez, cher docteur, que l’illustre praticien ne s’était pas trompé et que, grâce à ces moyens violents, ma santé est redevenue excellente.

— En effet, madame, la cure a été radicale, répondit le docteur en souriant ; il est bien heureux aujourd’hui, pour vous, que l’on vous ait donné cette éducation excentrique ; à part la santé qu’elle vous a rendue, elle vous sera maintenant d’un très grand secours pour opérer votre évasion, donner le change et égarer les recherches que l’on tenterait de faire.

— Comment cela, docteur ? fit-elle curieusement.

— Avez-vous des vêtements d’homme, ici, à Saint-Jean-de-Luz.

— Certes, mon cher docteur ; j’en ai deux ou trois malles pleines ; mais, depuis mon mariage, c’est-à-dire depuis quatre ans, je n’ai jamais eu occasion de revêtir ces habits d’un autre sexe, sauf une fois à Paris, pour assister à un bal masqué donné pendant le carnaval par la duchesse de Chaufontaine, où je me suis rendue, en page Henri III.

Et elle soupira.

— Vous avez des habits d’homme ? Tant mieux ; ils vous serviront cette nuit. Maintenant, permettez-moi de vous donner quelques renseignements indispensables pour dissimuler votre fuite.

— Parlez, mon bon docteur, je vous écoute.

— Vous connaissez bien les environs, n’est-ce pas ?

— Oui, à dix lieues à la ronde, je les ai souvent parcourue à cheval et en voiture ; je ne crains donc pas de m’égarer.

— Très bien ; alors cela marchera tout seul.

— Voyons, voyons, fit-elle avec insistance.