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Page:Aimard - Les Peaux-Rouges de Paris II.djvu/165

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d’un daim poursuivi par les chasseurs. Combien de temps dura cette course affolée ? Je ne saurais vous le dire. Je tombai épuisé au milieu d’un buisson. Je pensai tant bien que mal mon bras, qui me faisait beaucoup souffrir, et presque aussitôt mes yeux se fermèrent ; et, malgré tous mes efforts pour rester éveillé, je m’endormis d’un sommeil presque léthargique. Quand je m’éveillai, le soleil était presque au niveau de l’horizon ; je me remis en route, cueillant çà et là des fruits sauvages pour tromper la faim et la soif qui me dévoraient ; le hasard me fit trouver cet arbre creux dont je fis ma demeure. On n’avait pas songé à m’enlever mon tabac, ma pipe et mon briquet. Ce fut ce qui me sauva, en me permettant d’allumer du feu. Mais, manquant des armes nécessaires pour chasser, j’en fus réduit à ne me nourrir que de quelques fruits insuffisants pour calmer ma faim ; le découragement s’empara de moi, et dans quelques heures peut-être je serais mort, si vous n’étiez pas si heureusement venu à mon secours.

— J’en suis charmé pour vous et pour moi, mon camarade ; je compléterai ma bonne action en vous fournissant les armes nécessaires à votre défense.

— Vous feriez cela ?

— Tout de suite si vous voulez ; voici un rifle, un machete, deux revolvers à six coups, de la poudre et des balles ; êtes-vous satisfait ?

— Oh ! satisfait, oui, s’écria-t-il ; et plus reconnaissant que je ne puis vous dire ; mais, vous ?

— Ne vous inquiétez pas de moi, je suis armé jusqu’aux dents ; je ne sais pourquoi en quittant le camp la pensée m’est venue de prendre toutes mes armes en double ; c’était un pressentiment, ajouta-t-il en riant.

— Merci mille fois ; vous me rendez la vie ; si quelque jour vous avez besoin de moi, vous ne me trouverez pas ingrat.

— Je l’espère, mais, dites-moi, que comptez-vous faire maintenant ? retournerez-vous près du Mayor ?