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Page:Aimard - Les Peaux-Rouges de Paris II.djvu/263

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Surtout au quartier des Arts-et-Métiers, dans les rues Guérin-Boisseau, des Vertus, Tirechappe et d’autres encore, dont certains tronçons n’avaient pas été absorbés par les embellissements de la ville, ils s’établirent plus solidement que jamais.

Aujourd’hui, dans le peu qui a survécu de l’ancien quartier des Arts-et-Métiers, tout a repris son train ordinaire ; à cette différence près, que les bandits de toute espèce réfugiés dans ces bouges, malgré toute leur adresse, sont moins heureux que leurs devanciers des anciens jours.

Trop souvent pour eux, les rondes de police viennent troubler leurs ébats, apparaissent à l’improviste au milieu d’eux et les emballent, par de formidables coups de filet.

Aussi, pendant un de mes voyages de découverte dans ces limbes de la civilisation, l’un de ces déclassés me disait-il avec un hochement de tête mélancolique, ce qui, je l’avoue, ne m’attendrit nullement :

— C’est fini le bon temps est passé… la lumière nous tue… Ah ! maintenant, il n’y a plus de plaisir !

En effet, la police a ses coudées franches, et elle en profite pour purger la ville.


Le mardi 29 mars 1870 fut une des journées les plus froides de l’année, bien que depuis huit jours, d’après tous les almanachs, le printemps fût commencé.

L’ombre s’épaississait sur la ville.

Il gelait depuis l’avant-veille, et le baromètre baissait de plus en plus.

Les boulevards et les rues étaient déserts.

Les becs de gaz ne répandaient qu’une lueur triste à travers leurs vitres ternies, et enveloppées d’un halo de mauvais augure.

Au moment où le dernier coup de sept heures tintait à l’église Saint-Merry, un homme tourna le coin de la rue Saint-Martin et entra dans la rue des Gravilliers, se dirigeant vers la cour de Rome.